200.000 dollars de peinture blanche pour sauver les Andes péruviennes

Les Andes péruviennes recouvertes de peinture de chaux. Quatre hommes en bleus de travail entreprennent depuis mi-juin de badigeonner de blanc une immensité rocheuse, à 4.700 mètres d'altitude. L'objectif : éviter ni plus ni moins une fonte des glaciers, qui serait dévastatrice pour l'économie locale. Farfelu ? Peut-être, mais même la Banque mondiale (BM) y croit : elle a investi 200.000 dollars pour rendre possible ce projet aussi délirant que désespéré.Derrière cette idée folle se cache un homme nommé Eduardo Gold. Il se fonde sur un principe scientifique connu de tous : le blanc réfléchit les rayons du soleil au lieu de les absorber et d'en conserver toute la chaleur. Eduardo Gold espère ainsi recréer un micro-climat, atténuer le réchauffement subi par cette zone pour ralentir la fonte des glaciers. En deux semaines, son équipe a recouvert deux hectares de peinture de chaux sans adjuvant chimique. L'objectif est de « peindre » 70 hectares sur trois sommets. Une infime proportion des 3.000 kilomètres des Andes péruviennes. Les doutes des scientifiquesEn 2009, la Banque Mondiale a récompensé Eduardo Gold d'un prix dans le cadre des « 100 idées pour sauver la planète". Avec quelques scientifiques, elle soutient l'initiative de l'ingénieur. Mais nombre de spécialistes se montrent dubitatifs. Le ministère de l'Environnement péruvien lui-même a qualifié cette expérience d' « absurde », et regretté que les 200.000 dollars n'aient pas été utilisés dans un projet plus utile pour lutter contre le changement climatique. Plus clément, l'Institut de Recherche pour le développement de Lima estime que ce projet peut ralentir un peu la fonte des glaciers et éviter quelques dixièmes de degrés de plus au thermomètre, voire 1 ou 2 degrés, à l'échelle locale. Problème : les Andes péruviennes s'étendent sur plus de 3.000 kilomètres et le champ d'action de l'expérience de Gold paraît donc extrêmement limité.Un projet farfeluPour Etienne Berthier, glaciologue au Laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiales (LEGOS) de Toulouse, le projet est « farfelu, mais intéressant ». « Agir sur les roches qui entourent le glacier peut avoir un effet, mais le plus important c'est d'agir sur le rayonnement solaire qui arrive sur le glacier lui-même. Cela paraît donc illusoire, même si c'est une aventure grandeur nature extraordinaire et très intéressante à l'échelle de la recherche. »Les plus convaincus par le projet restent les habitants du village de Licapa, à 4.000 mètres d'altitude. Ils ont besoin d'y croire. Depuis 50 ans, ils ont vu le Chalon Sombrero se muer en un pic rocheux. La disparition progressive du glacier diminue les ressources en eau et donc les pâturages, qui sont l'unique source de revenus d'une région où rien ne pousse en raison de l'altitude. Eduardo Gold estime que les 900 habitants devront partir d'ici 20 ans si rien n'est fait pour préserver le glacier. Il sera alors bien inutile de tenter quoi que ce soit pour les aider.
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