Le sommet UE-Japon dans l'impasse avant d'avoir commencé

Le sommet UE-Japon ressemblera-t-il aux rituels vains et quasi religieux des années précédentes ? Le Premier ministre du Japon Naoto Kan doit se rendre le 25 mai à Bruxelles pour un nouveau round de discussions destiné à déboucher, à terme, sur un accord de libre-échange (ALE). Après la catastrophe naturelle au Japon, les dirigeants des 27 voient dans l'ouverture de la négociation d'un ALE l'expression du soutien de l'Europe. Sans compter que cela permettrait de faire enfin tomber les barrières, surtout non tarifaires, qui gênent leur activité au Japon : homologation longue, coûteuse et inutile des médicaments, additifs alimentaires spécifiquement non reconnus, etc. Toutefois, la méfiance règne dans les rangs du patronat européen, après vingt ans de discussions pour faire ouvrir le marché japonais, sans succès. « Nous ne voulons pas faire de cadeaux aux Japonais car ce sont des concurrents redoutables », explique Adrian Van den Hoven, directeur des relations internationales de Business Europe. Barrières non tarifairesConsidérant que « l'UE prendrait des risques importants en négociant à l'aveugle », le patronat européen demande que le Japon s'engage avant toute chose à lever ses barrières non tarifaires, à ouvrir ses marchés publics, à s'ouvrir aux investissements étrangers et à ouvrir son marché agroalimentaire à la concurrence. De son côté, le patronat japonais réclame la fin des barrières tarifaires européennes sur l'automobile et l'électronique japonaise. Plus généralement, il s'inquiète de l'isolement de ses entreprises dans la mondialisation, en particulier au regard des coups de boutoirs de leurs concurrentes sud-coréennes. Séoul a déjà négocié deux ALE révolutionnaires avec l'UE et les Etats-Unis. Problème : Si en Corée du Sud le politique est roi, au Japon, il est la dernière roue d'un carrosse tiré par les lobbys de toutes obédiences. Le Premier ministre, poste bien moins puissant au Japon que dans les autres démocraties, est à la merci de ministères totalement acquis aux industries qu'ils sont censés chapeauter. Et les négociateurs qui rencontrent leurs homologues européens, soit le ministère des Affaires Étrangères et celui de l'Industrie, ne sont pas, in fine, les décideurs. Ainsi le ministère de l'Agriculture bloque-t-il des quatre fers l'entrée des produits agroalimentaires européens... Comme toujours, Naoto Kan se rendra donc à Bruxelles comme ligoté, promettant des progrès que lui dénieront les hauts fonctionnaires restés à Tokyo.Régis Arnaud, à Tokyo, et Yann-Antony Noghès, à Bruxelle
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