Universal redevient 100 % américain

Avec la cession par Vivendi de ses 20 % dans NBC Universal, la propriété des studios Universal redevient donc entièrement américaine, après avoir été étrangère pendant vingt ans. En 1990, l'électronicien japonais Matsushita les racheta à l'américain MCA. Puis vint le groupe de spiritueux canadien Seagram, qui le reprit en 1995, et le combina avec les disques Polygram. Enfin, le français Vivendi fusionna avec Seagram en 2000. Il revendra, en 2003, 80 % des studios à General Electric pour former NBC Universal.Tous ces étrangers étaient attirés par l'aura du studio, créé en 1909 par un immigré juif allemand, et longtemps spécialisé dans les petits budgets, mais qui atteint son apogée dans les années 1970, avec les films de Steven Spielberg (« les Dents de la mer », « ET »), mais aussi « American Graffiti », « Retour vers le futur »? Pourtant, à l'exception du rachat de Columbia par Sony, les étrangers n'ont guère eu de chance lorsqu'ils ont voulu s'emparer des majors hollywoodiennes. On se souvient du désastreux rachat de la MGM par le Crédit Lyonnais. D'abord, pour une raison géographique évidente : difficile de diriger un studio depuis Tokyo, Paris, ou même New York, où le PDG de Vivendi Jean-Marie Messier (J2M) s'était installé en 2001 pour être plus près de ses actifs américains. Comme le reconnaissait son successeur Jean-René Fourtou en 2003 : « Il est illusoire de penser que nous pouvons développer nous-mêmes ces actifs. Pensez-vous que nous, Français, puissions impulser une stratégie de films américains à Los Angeles ? »indépendanceSurtout, parce que le microcosme hollywoodien est jaloux de son indépendance. « Consommateurs, attention ! » titrait ainsi en une, en faux idéogrammes japonais, la bible du secteur, « Variety », lors du rachat par Matsushita. Ce dernier, comme Sony ou Seagram, eut aussi la mauvaise idée de débarquer la direction en place pour placer ses hommes. Ayant retenu la leçon, Vivendi prit bien soin de laisser en place le président du studio, Ron Meyer, tout comme le patron d'Universal Music, Doug Morris ? tous deux encore à leur poste aujourd'hui. Et, juste après le rachat, J2M tenta de donner des gages : « J'ai appris comment les gens parlent à Hollywood. J'ai un nouveau vocabulaire. À Hollywood, les gens ne m'appellent pas Monsieur, mais Baby, Buddy, Bubbela? » assurait-il en juillet 2000, jurant avoir assimilé les rites locaux, comme le déjeuner aux sushis et le dîner au bord de la piscine? Pierre Lescure, le patron de Canal Plus embarqué dans la fusion Vivendi Universal, abondait : « Je ne vais pas jouer au Mogul. Je ferai oublier le stéréotype du Français exaspérant qui croit tout savoir. » J2M tenta aussi de renforcer le studio via deux acquisitions : une participation dans le bouquet de télévision par satellite Echostar, et une série de chaînes câblées (USA, Sci-Fi, 13e Rue...). Mais la mayonnaise ne prit guère mieux. Les dirigeants du studio refusèrent d'obéir lorsqu'on leur demanda d'inscrire « a Vivendi Company » sous le nom d'Universal lors du prégénérique des films. Au procès en nom collectif (class action) en cours à New York, J2M raconte aussi avoir eu du mal à refacturer à ses filiales américaines les frais pris en charge par le siège.Une fois J2M évincé, la nouvelle équipe décida rapidement de vendre le studio ? mais garda la musique dont personne ne voulait. Nombreux furent ceux qui regardèrent le dossier, dont Comcast (déjà) et Viacom. Des offres furent déposées par le milliardaire Marvin Davis, Edgar Bronfman associé au câblo-opérateur Cablevision, Liberty Media (le groupe de John Malone), et la MGM. Mais General Electric fit la meilleure offre. JAMAL HENNI
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