Un soir de pluie, une tour émerge. Elle tranche par ses couleurs vives avec les lumières discrètes des rues parisiennes. Les étages les plus élevés se sont habillés d'orange et de jaune. Le ventre de la tour décline un vert fluoré. Les étages du bas égrènent des bleus maritimes. Ce dégradé de couleur décalé, un rien tokyoïte, est surprenant, audacieux dans ce monde haussmannien.Cet édifice de 95 mètres n'est autre que la tour centrale du campus de l'université de Jussieu, entièrement remise à neuf et « livrée » le 22 juin. Sise dans un campus dont le nom était tristement associé à l'amiante, ce bâtiment n'était qu'une « verrue » aux yeux de bien des Parisiens. La tentation était grande de raser la tour. Un prérapport d'enquête par l'inspection des finances, l'inspection générale de l'administration de l'Éducation nationale et le conseil général des Ponts et Chaussées avait même proposé de la détruire au lieu de la rénover. Ce fut finalement la deuxième option qui a été choisie.Pour redonner à ce bâtiment très décrié une légitimité, une fonction esthétique, l'architecte Thierry Van de Wyngaert a choisi de l'habiller de lumière. « Nous avons essayé de changer le regard sur ce bâtiment très carré, très rigide, sachant que le budget, contraint, ne permettait pas de le redessiner. Nous avons équipé chacun des étages de tubes colorés, en allant des couleurs les plus froides au niveau du sol aux couleurs les plus chaudes en haut de la tour », précise-t-il.Tour en mouvementPar ce système d'éclairage innovant, Thierry van de Wyngaert a aussi cherché à retrouver le projet originel d'une « tour en mouvement » voulu par Édouard Albert, l'architecte qui conçut Jussieu en 1964. Le projet d'origine prévoyait en effet à chaque étage un décalage des façades de 6 cm par rapport à la ligne des poteaux tubulaires présentant l'avantage d'alléger la tour, le dessous des dalles béton passant de 6 cm au 24e étage à 1,44 m au 1er.La façade a aussi été épurée. Le verre fumé a laissé la place à un verre plus transparent et l'habillage en aluminium des panneaux de façade a été allégé. Profitant du fait que le chantier de désamiantage mené de janvier 2004 à septembre 2005 avait mis à nu les plateaux de la tour, toutes les installations en place ? de l'électricité à la plomberie en passant par les câbles informatiques ? ont été revues. Coût total des travaux?: 26 millions d'euros (hors désamiantage). Un autre cabinet d'architecture reconnu, Reichen & Robert, est chargé pour sa part de mettre à neuf le campus lui-même, la fin des travaux étant prévue pour 2016. Une condition pour que Jussieu ne soit plus perçu comme un château fort ou un camp retranché.Sophie SanchezLa tour de Jussieu fait peau neuve

latribune.fr

05 Sept 2009, 1:38

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