Choc de compétitivité : trois pistes pour renforcer la recherche académique française

La compétitivité du tissu industriel français ne peut d\'aucune manière se trouver dans le coût des produits et services vendus mais dans le degré d\'innovation qu\'ils contiennent. Cette innovation est la résultante directe de la qualité de notre système d\'enseignement et de recherche. La recherche académique dans le monde a toujours eu 10 ans d\'avance sur la globalisation. Les laboratoires de recherche sont multiculturels depuis des décennies, les chercheurs lisent la même littérature scientifique, utilisent le même matériels, écrivent selon les mêmes codes, fréquentent les mêmes congrès. Cette globalisation c\'est encore accélérée avec la révolution numérique où toute publication est lue par toute une même communauté scientifique au même instant sur la surface du globe. En conséquence, les idées, concepts scientifiques ou découvertes, qui se cristallisent par le croisement d\'une accumulation de connaissances, voient le jour au même moment et en plusieurs endroits dans le monde. Ces découvertes se concrétisent de deux manières, par la publication d\'articles scientifiques et la prise de brevets d\'inventions. Dans ce monde, il n\'y a pas de place pour les seconds.La France investit près de 43 milliards d\'euros en recherche et développement par an, soit 2,2% de son PIB. Aujourd\'hui, la question n\'est plus de se demander s\'il faut dépenser plus, mais comment dépenser mieux. Dans la recherche académique, les moyens sont essentiellement mis sur la masse salariale avec une moyenne de salaires très peu attractive pour le niveau d\'étude requis contre un budget de fonctionnement qui laisse la majorité des laboratoires sans ressources dès la fin du premier semestre de chaque année. La conséquence est qu\'une large part de l\'activité des chercheurs est consacrée à trouver des financements plutôt qu\'à leurs recherches. En outre, la recherche de financement à l\'effet pervers de brider la créativité des laboratoires sur des thématiques de recherches fondamentales et les orientent vers des thématiques d\'application tel que le cancer ou l\'Alzheimer. La plupart des découvertes de ruptures résultent de recherches non orientées vers de l\'applicatif. Depuis 30 ans, de nombreuses découvertes de rupture ont été faites en France, pour être développées dans d\'autres pays (essentiellement les Etats-Unis) qui en tirent les bénéfices des développements industriels.La bonne nouvelle est qu\'en France il y a de l\'innovation et de l\'argent. La mauvaise nouvelle est que cet argent est mal utilisé pour capitaliser sur ces innovations. Il faut réformer le système de la recherche académique en France pour qu\'elle puisse se donner les moyens de lutter avec la compétition internationale. Décréter l\'excellent ou la compétitivité n\'est pas une méthode car excellence et compétitivité sont des constats de situation. Observons là où des découvertes de rupture radicale émergent sur notre territoire et mettons des moyens significatifs pour être les premiers et engranger tous les bénéfices de ces découvertes. Ce sont des paris risqués mais payants sur le long terme car nous serons excellents et compétitifs au moins dans quelques domaines.Voici trois pistes pour rester dans la compétition internationale :1- changer le statut du chercheur académique. Le métier de chercheur peut être un emploi à vie pour certains mais pas pour tous. On peut être créatif pendant une période de sa vie puis faire bénéficier de ses connaissances et de sa formation d\'autres secteurs d\'activités qui manquent cruellement de scientifiques.2- rendre les salaires des chercheurs plus attractifs et valorisants en France comparé aux normes internationales. Il est indécent de payer des bac+10, moteurs de notre compétitivité aux salaires actuels dans le monde académique. Sortir des grilles les hauts profils.3- utiliser l\'ANR comme vecteur de financement de laboratoires ultraperformant afin qu\'ils deviennent, avant les autres, leaders mondiaux. Ces financements ne doivent pas être fléchés sur des sujets mais sur les hommes (ce sont eux le capital inventif). Ils ne doivent pas être contraints (sujets de recherche, salaires, investissements, fonctionnement etc.). Ils doivent être limités dans le temps (5 ans) et leurs performances évaluées à terme.Une industrie compétitive doit se reposer sur une recherche académique de premier rang. C\'est par ici que doit commencer ce «choc de compétitivité» si cher à nos pouvoirs publics depuis des décennies.  par André Choulika, président de France Biotech.
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