Enquête lyonnaise sur un peintre oublié : Louis Cretey

Le nom de Louis Cretey ne vous dit rien, et pour cause : le peintre a été redécouvert voici quarante ans par les historiens d'art, épaulés par des collectionneurs passionnés. De Cretey, on ne connaît que très peu de choses. Tout juste sait-on qu'il vécut entre 1635 et 1702. Rétif aux actes notariés, il ne signe pas, date encore moins ses toiles. Pourtant, il a légué à la postérité une oeuvre originale et particulière, que l'exposition du musée des Beaux-Arts de Lyon éclaire aujourd'hui avec justesse.Tout part du réfectoire du musée, ancienne abbaye royale. Cretey y exécute en 1684 deux décors : une « Cène » et une « Multiplication des pains ». À partir de ces oeuvres, restaurées en 2009, les historiens ont enquêté sur ce peintre peu connu, le pistant de Lyon en Italie, à Rome et à Parme.C'est une exposition « en creux », où la figure de l'artiste prend chair peu à peu, que propose le musée lyonnais. Près d'une soixantaine d'oeuvres sont réunies, souvent inédites : de ce corpus impressionnant émerge un style fort, particulier, entre classicisme français, baroque italien et langage personnel. Il n'y a qu'à contempler « la Décollation de saint Jean-Baptiste » conservé au palais Barberini à Rome, son clair-obscur et son anatomie exacerbée pour comprendre ce que Cretey a emprunté de l'art de Rubens et du Caravage, en y ajoutant sa patte : une manière puissante, des physionomie caractéristiques, presque une « anatomie de la laideur ». On pense au Greco, tant la couleur paraît défragmentée par la touche très moderne du peintre. Le parcours de l'exposition nous entraîne sur ses pas, entre Lyon et Rome, suivant un découpage stylistique, la documentation chronologique faisant défaut. Le travail des chercheurs a été colossal pour répertorier dans les collections publiques et privées des oeuvres longtemps attribuées à Salvator Rosa, à ses contemporains italiens, ou même à l'école allemande. Des yeux globuleux, des fronts fuyants, un palmier penché, des montagnes au relief particulier : tels sont les indices laissés par Cretey au fil de ses toiles. Réunis pour la première fois, ses tableaux ne forment que le début d'un corpus encore balbutiant.Pourquoi cet oubli de plusieurs siècles ? L'artiste n'est pas médiocre, loin de là. De son vivant, ses paysages étaient collectionnés par les plus grands cardinaux de la curie romaine, de grands ordres religieux lui passaient commande, le préférant parfois à des artistes beaucoup plus connus. Entre Lyon et Rome, Louis Cretey n'est jamais passé par Paris, ce qui expliquerait sa mauvaise fortune historiographique. Un oubli que le musée des Beaux-Arts de Lyon vient de réparer avec brio. « Louis Cretey, un vision-naire entre Lyon et Rome », au musée des Beaux-Arts de Lyon, jusqu'au 24 janvier 2011. Tél. : 04.72.10.17.52. www.mba-lyon.fr
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