« L'euro est trop fort, compte tenu de la faiblesse de la croissance »

Le plan de sauvetage grec arrive-t-il trop tard ?Les efforts demandés à la Grèce par l'Europe et le FMI ne sont pas crédibles. On ne peut pas exiger une amélioration aussi rapide de ses finances publiques dans un contexte de récession. Les marchés ont très vite compris qu'il y avait là un espace de spéculation. Ils testent la constitution européenne et ses incohérences empêchant la mise en oeuvre d'un vrai plan de sauvetage. Et l'on ne voit pas pourquoi ils s'arrêteraient là. Il y a un vrai risque de contagion.Que faut-il faire ?Il faut fermer les espaces de spéculation en affirmant la solidarité budgétaire européenne. Il faut pour cela un acte politique fondateur. Il faut que la zone euro garantisse collectivement les dettes publiques de ses membres. Il existe deux solutions. Soit la zone euro se porte collectivement garante de la dette grecque, soit elle émet des obligations européennes (eurobonds).Fondamentalement, le problème n'est-il pas celui de la gouvernance économique de la zone euro ?La crise actuelle est d'abord politique. Les finances publiques (déficit et dette) sont globalement en bien meilleurs états dans la zone euro qu'aux États-Unis ou au Japon. C'est pourtant en Europe que se déchaîne la spéculation. Il faut que l'Union européenne se dote d'une autorité budgétaire légitime disposant d'une capacité d'emprunt.Cela ne revient-il pas à accorder une prime aux pays les moins vertueux ?Il faut savoir ce que l'on veut ! Est-ce que l'Europe est une Union ou une classe de bons élèves ? Si c'est une classe de bons élèves alors il faut une autorité ayant suffisamment de légitimité pour imposer des sanctions. Or, la légitimité des instances européennes est faible. D'autant plus faible que les grands pays échappent systématiquement aux sanctions.Le problème de la zone euro n'est-il finalement pas que les écarts de compétitivité ne peuvent être corrigés ?Il existe deux façons de restaurer la compétitivité d'un pays en union monétaire. La première consiste à faire baisser les prix et les salaires. Cette stratégie, que l'on impose aujourd'hui à la Grèce, est non coopérative car elle revient à étouffer la demande intérieure d'un pays au détriment de ses partenaires commerciaux. La seconde solution, coopérative, consiste à investir pour accroître les gains de productivité. Au lieu de demander à la Grèce de mettre en oeuvre une politique déflationniste productrice de chômage, l'Europe aurait intérêt à aider Athènes à améliorer la productivité de son économie. Mais c'est évidemment utopique dans le contexte actuel de renouveau des nationalismes européens.L'euro est-il en danger ?Non ! L'euro est même trop fort, compte tenu de la faiblesse de la croissance européenne. Le risque aujourd'hui est une contagion des politiques d'austérité, et donc déflationnistes, en Europe. Dans un contexte d'endettement public et privé élevé, l'adoption de politiques déflationnistes est la pire des solutions. Le principal danger pour l'Europe aujourd'hui est un risque de déflation par la généralisation des politiques d'austérité.Propos recueillis par Xavier Hareljean-Paul Fitoussi, directeur de l'Observatoire français des conjonctures économique
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