« 20 % des TGV dégagent des pertes »

David Azéma, directeur général délégué stratégie et finances du groupe SNCFLe groupe SNCF tire actuellement la sonnette d'alarme : pour lui, les péages payés par les TGV au gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire RFF sont trop élevés et mettent en danger le modèle économique du TGV. Pourquoi ?Aujourd'hui, on s'imagine pouvoir augmenter les péages payés à RFF indéfiniment sans que cela ait de conséquences sur l'offre de services. Or ce n'est pas vrai du tout. Notre capacité à payer a été aujourd'hui dépassée. Sur la base des tarifs 2009, 20 % des TGV dégagent déjà des pertes, surtout sur les lignes ne passant pas par Paris, mais aussi sur celles entre la capitale et les villes moyennes de province. Sur la base des tarifs 2011, 30 % de nos TGV afficheront des résultats négatifs dans deux ans. Dès aujourd'hui, beaucoup de nos TGV ne sont donc plus rentables et ne financent plus leurs investissements. D'ici trois ans, si nous poursuivons comme cela, l'activité globale TGV pourrait ne plus dégager de marge. Il est surprenant que l'État demande à RFF d'améliorer ses résultats indépendamment de la capacité du transporteur à payer ces niveaux de péage sans remettre en question son modèle économique.Quelles sont les conséquences ?Nous tenons compte de la baisse de rentabilité de nos trains en cherchant à adapter autant que possible nos investissements, qui s'élèveront cette année à 2,5 milliards d'euros. Nous avons ainsi décidé de prolonger la durée de vie de nos rames existantes, plutôt qu'en acquérir de nouvelles.Quelles solutions préconisez-vous ?Il faut se mettre autour de la table et partager le constat sur la limite de capacité à rémunérer le réseau des transporteurs, qui assurent des bouquets de dessertes variées et dont la profitabilité d'ensemble doit être assurée. Sinon il faut changer de modèle et dire que TGV n'est pas une activité marchande mais une activité de service public qui doit être conventionnée. TGV a trop longtemps été considéré comme une vache à lait permettant de financer les déficits du fret, l'absence actuelle de financement des trains d'aménagement du territoire, les pertes résultant des contrats avec RFF sur la maintenance du réseau et les dessertes TGV non profitables. Il faut d'ailleurs savoir que les lignes à grande vitesse payent 41 % du montant total des péages, alors qu'elles ne représentent que 6 % du réseau.Vous avez récemment indiqué que le système ferroviaire ne pouvait pas s'autofinancer. Mais RFF porte une dette de 28 milliards. Que se passe-t-il à l'étranger ?Pour la Commission européenne, la responsabilité des infrastructures est celle des États ou de leurs démembrements. En outre, dans les autres pays de l'Europe occidentale, la plupart des organismes qui portent l'infrastructure ne portent plus la dette historique liée à la construction du réseau. Lors de la création de RFF en 1997, il a été pensé que le réseau pouvait se développer avec une baisse de la contribution publique au secteur. Ce raisonnement erroné a conduit à cantonner un niveau de financement insuffisant. L'observation des systèmes étrangers démontre en effet qu'une ambition ferroviaire s'accompagne toujours d'une hausse des financements publics.
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