Les banques centrales restent en alerte

L'hiatus a rarement été aussi manifeste. En dépit des pronostics optimistes des grands instituts de prévisions, qui tablent tous sur un retour de la croissance, déjà engagée dans les pays industrialisés après le choc des deux dernières années, les grandes banques centrales, dont les conseils se sont réunis en rafale cette semaine, ont une position commune : il est urgent d'attendre. Les économistes ? qui sont légion à annoncer la mise en ?uvre prochaine de stratégies de sortie de crise ? en sont pour leurs frais. Ni les États ni les banques centrales n'ont l'intention de bousculer le calendrier après avoir traversé la pire crise depuis les années 1930.La Réserve fédérale américaine (Fed), dont les sages se réunissaient mercredi, a reconduit son dispositif de crise, se contentant de réduire de 200 à 175 milliards de dollars les rachats de dette aux agences de refinancement hypothécaires, qui de toute façon en ont moins besoin. La Fed a maintenu son taux directeur dans la fourchette de 0 % à 0,25 % en vigueur depuis décembre, au plus bas de l'histoire des États-Unis et, bien qu'elle n'ait pas l'intention d'abonder son programme de rachat de titres de la dette publique américaine désormais bouclé, à 300 milliards de dollars, elle poursuivra ses rachats de créances hypothécaires jusqu'à la fin du premier trimestre. Au total, la banque centrale aura acquis 1.500 milliards de dollars de titres destinés à soutenir le marché immobilier sinistré.La Banque centrale européenne, qui réunissait son conseil des gouverneurs hier a, elle aussi, maintenu son taux directeur à 1 %, au plus bas de ses presque onze années d'histoire, sans laisser entrevoir de remontée dans un avenir prévisible. Mieux, son président, Jean-Claude Trichet, s'est déclaré satisfait de la façon dont le taux au jour le jour de la zone euro ? l'Eonia ? évoluait actuellement. Ce taux se cale depuis le début de l'été beaucoup plus près du taux plancher de la BCE, le taux des dépôts fixé à 0,25 % depuis mai, que du taux directeur, qui comme son nom l'indique devrait guider son évolution. Le même Trichet, s'il reconnaît que l'activité économique s'est améliorée, a martelé lors de sa conférence de presse que les stratégies de sortie de crise ne seraient mises en ?uvre que très graduellement. Signe que l'heure n'est pas à l'« exit », comme disent les Anglo-Saxons : la Banque d'Angleterre, qui se débat avec une économie en récession depuis six trimestres, a même réactivé ses mesures de crise en relevant hier, à l'issue de son propre conseil, le montant de ses rachats d'actifs de 175 à 200 milliards de livres, tout en maintenant son taux directeur à son point bas de tout temps de 0,5 %.Le constat est partout le même : la reprise embryonnaire qui se dessine, sans pour autant redonner de l'oxygène à un marché de l'emploi gravement dégradé, ne tient qu'aux plans de relance massifs des États et d'assistance respiratoire des banques centrales. Sans ces opérations chirurgicales d'urgence, la reprise ne serait pas au rendez-vous. Leur retrait ne sera possible que lorsque l'on pourra réfuter le diagnostic de Jean-Claude Trichet : le niveau d'incertitudes reste extrêmement élevé.
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