EADS : comment Denis Ranque s'est retrouvé candidat à la présidence du conseil sans avoir rien demandé

Quelle ironie de l\'histoire... Si tout se passe bien, Denis Ranque, l\'ancien PDG de Thales qui ne demandait rien à personne, sera propulsé fin mars à la tête du conseil d\'administration d\'EADS, au moment où le groupe Lagardère s\'éloigne définitivement du géant européen. Et dans ce cas, Denis Ranque sera amené à dialoguer certainement avec le nouveau patron du groupe électronique, Jean-Bernard Lévy... un ancien de la maison Lagardère. Le monde de la défense et de l\'aéronautique est finalement... tout petit. L\'ancien patron de Thales, qui a abandonné tous ses mandats avant de prendre une année sabbatique pour réaliser un tour du monde à la voile, a dû être très surpris d\'être sollicité par le président exécutif d\'EADS, Tom Enders, au cours de son expédition - il est actuellement aux Caraïbes. Ce dernier l\'a convaincu d\'accepter. Car Denis Ranque, semble-t-il, \"s\'est senti gêné par le fait qu\'il s\'est opposé par deux fois au rachat de Thales par EADS\", explique une source à \"La Tribune\". C\'était en 2004, puis 2005. Du coup, il va interrompre la fin de son tour du monde.Camus favori d\'EADS, Lauvergeon soutenue par Paris  A ce jour, Denis Ranque est le favori pour succéder à Arnaud Lagardère à la tête du conseil d\'administration d\'EADS. Le sera-t-il encore lors de l\'assemblée générale extraordinaire convoquée fin mars ? Les cartes peuvent toujours être rebattues. Elles l\'ont déjà été. Car initialement, la direction du groupe européen avait pensé à Philippe Camus, un historique de chez Lagardère, qui avait de plus coprésidé le géant européen entre 2000 et 2005. Mais l\'ex-patronne d\'Areva, Anne Lauvergeon, soutenue par l\'Etat, notamment le président François Hollande, a senti la menace que représentait la candidature, légitime aux yeux du management d\'EADS, de Philippe Camus. \"Atomic Anne\" est donc sortie du bois le week-end dernier en jouant son va-tout.Ce qui a eu pour effet de mettre EADS en ébullition : l\'Etat français n\'a-t-il pas signé un accord sur l\'indépendance d\'EADS en décembre? Or dès janvier, il tente d\'imposer Anne Lauvergeon à la tête de son conseil. Elle n\'est pas encore proposée au conseil d\'administration, qu\'elle fait déjà grincer les dents au sein du groupe aéronautique. Le conseil d\'administration d\'EADS est souverain, insistait-on lundi au sein du groupe, après le coup de force de l\'ex-patronne d\'Areva. Et de rappeler que Paris a accepté la nouvelle gouvernance du groupe, qui est censée réduire l\'influence des Etats dans la gestion du groupe ainsi que dans ses décisions stratégiques. \"L\'Etat français n\'est pas au conseil d\'EADS, donc il ne nomme, ni n\'élit personne à la présidence du conseil\", faisait-on valoir.Camus et Lauvergeon se neutralisentPour Philippe Camus, président de l\'équipementier Alcatel-Lucent, l\'histoire malheureusement se répète. Une fois de plus, les politiques lui ont barré la route. Le ministre de l\'Economie, Pierre Moscovici, a été très clair fin janvier pour écarter sa candidature : \"Je crois que M. Camus a beaucoup à faire chez Alcatel\", avait-il affirmé. Résigné, EADS cède. Philippe Camus, qui a reçu de nombreux témoignages de soutien au sein d\'EADS, se retire. Le groupe ne pouvait pas s\'aliéner un de ses clients majeurs, l\'Etat français, mais en revanche, il refuse de se laisser imposer Anne Lauvergeon. C\'est une question de principe, et il le fait savoir. L\'Etat français, lui, doit rétropédaler.  Rappelant qu\'Anne Lauvergeon constitue \"un excellent choix, notamment au regard de ses compétences industrielles\", Matignon, qui précise que le gouvernement reste  \"très favorable\" à cette nomination, convient toutefois que \"ce sera au conseil d\'administration (d\'EADS, ndlr) de trancher\". Les deux camps se séparent sur un match nul : Philippe Camus, qui n\'a finalement pas été proposé au conseil, et Anne Lauvergeon se sont neutralisés.C\'est ainsi qu\'entre en scène la troisième personnalité : Denis Ranque. L\'ancien PDG de Thales, libre, n\'est initialement candidat à rien, sinon à un siége au conseil d\'un groupe enfin libéré de l\'influence des Etats. Après avoir passé quelque 10 ans à la tête de Thales jusqu\'à 2008, il est, comme Philippe Camus, un fin connaisseur des arcanes des industries de l\'aéronautique et de la défense. Il a toujours entretenu de bons rapports avec Tom Enders en particulier et avec les Allemands d\'EADS en général. Ces derniers ne l\'ont-ils par aidé dans le passé à contrer les raids du géant européen, lancés par le clan français d\'alors (Philippe Camus, puis Noël Forgeard). Denis Ranque, qui a participé à une fête de la bière à Munich à l\'invitation de Tom Enders et Manfred Bischoff (alors coprésident non exécutif d\'EADS), a réussi la gageure d\'organiser des réunions communes aux deux comités exécutifs de Thales et EADS pour travailler sur certains dossiers. De quoi lui donner une légitimité aux yeux des Allemands...
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