Le coût d'une réunification, cauchemar de Séoul

Alors que le Parti communiste nord-coréen organise en ce moment sa plus grande réunion depuis 1966, probablement pour acter la succession de son leader, malade, Kim Jong-il, la perspective d'une réunification de la Péninsule hante la partie sud. Le 15 août dernier, le président sud-coréen Lee Myung-bak a un peu surpris les siens en qualifiant « la réunification coréenne d'inévitable. Je crois que le jour est venu de commencer à s'y préparer, par exemple en créant un impôt pour la financer ». De quoi refroidir ses concitoyens les plus patriotes car si beaucoup de Sud-Coréens voient d'un bon oeil une théorique réunification avec le Nord... en pratique, ils rechignent à mettre la main au portefeuille.« La Corée du Sud n'est absolument pas prête à une réunification brutale », tranche Hong Hyun-ik, spécialiste du sujet à l'institut Sejong, à Séoul. L'exemple allemand, les 1.300 milliards d'euros déboursés pendant vingt ans par l'Allemagne de l'Ouest, donne des sueurs froides : car l'économie est-allemande de l'époque était éclatante de santé, si on la compare à celle de la Corée du Nord aujourd'hui en ruines15e économie mondialeLe contraste est saisissant avec la Corée du Sud, 15e économie mondiale. Selon la banque centrale sud-coréenne, le PIB du Sud est 38 fois plus élevé que celui du Nord. Un fossé qui ne cesse de se creuser. Selon le think tank américain Rand Corporation, ramener le niveau de vie du Nord à celui du Sud coûterait la bagatelle de 1.340 milliards d'euros. « Le coût d'une réunification serait divisé par sept en cas d'intégration économique graduelle », estime Hong Hyun-ik. Une approche déjà expérimentée depuis six ans dans le parc industriel de Kaesong, situé en territoire nord-coréen : 110 entreprises du Sud y emploient plus de 42.000 employés venus du Nord. Le complexe résiste toujours, tant bien que mal, aux tensions entre les deux Corées.« C'est de dix Kaesong que nous avons besoin ! », souligne Hong Hyun-ik, qui poursuit : « une telle approche graduelle permettrait d'amener naturellement la Corée du Nord à entreprendre des réformes économiques. Et pour cela, il faut privilégier une coopération économique intercoréenne, qui doit être découplée de la question de la dénucléarisation ».L'expérience de Kaesong suggère aussi qu'une réunification ferait l'affaire de l'industrie du sud, qui profitera de la main d'oeuvre moins chère (qu'en Chine) de la Corée du Nord, bien éduquée, et parlant la même langue. Une réunification donnera aussi au Sud accès aux ressources naturelles du Nord, aujourd'hui exploitées... par la Chine. FREDERIC OJARDIAS, à Séoul
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