Mondrian, un mystique de l'art

Vers 30 ans, il ressemblait à ces poètes russes dont le portrait fut transmis par l'imagerie populaire. Visage angulaire, barbe de pope, chevelure longue et dense séparée par une raie au milieu du crâne. Piet Mondrian (1872-1944) vit et travaille dans un atelier où règne un désordre bohème. Quelques décennies plus tard, il se montre en costume trois pièces, moustache à la Chaplin, l'attitude plutôt mondaine qu'artiste. Et son atelier est désormais à l'image de sa peinture, composé avec un sens vertigineux de l'architecture, la maîtrise du blanc et quelques couleurs de base.On dit que l'homme n'aime pas voir les arbres et qu'il adore danser. Surtout le charleston. C'est dans cette humanité-là que Beaubourg nous montre Mondrian, aux grandes étapes de sa création artistique. Et il n'est pas seul mais entouré de quelques artistes. Ensemble, ils ont fondé dans les années 1910 « De Stijl » (Le Style), un mouvement qui a complètement bouleversé l'abstraction, l'architecture et tout simplement l'art de vivre. Son chef de file étant Theo Van Doesburg.Néerlandais d'origine, Mondrian, dont l'oeuvre essentielle naquit à Paris, a laissé dans l'art une trace indélébile. Trace qui au départ fut assez sinueuse. Il s'exprime d'abord par la couleur dans l'esprit des fauves allemands. Mais à l'intérieur de cette couleur il y a déjà ces lignes qui dessinent la frondaison d'un arbre ou les contours d'un nu. Il s'approche aussi du symbolisme. Lorsque s'impose le cubisme, il s'en empare. À sa manière. En cherchant toujours sa propre identité. Mais la peinture chez Mondrian c'est aussi une pensée, une philosophie dont les racines s'accrochent à Hegel. Un théoricien qui met à mal tout ce qui l'a précédé prônant un art qui est étroitement associé à une nouvelle modernité.Cette modernité, c'est l'épure, l'essence même des choses. Ainsi il élimine tout ce qui figure le réel de ces compositions pour déboucher sur ces sortes de vitraux architecturaux qui renvoient à une mystique contemporaine de la peinture. C'est à Paris, dans les années 1920 que Mondrian trouve la forme définitive de son art. Il utilise trois couleurs de base, le bleu, le rouge et le jaune. L'espace de la toile blanche est structuré par des lignes noires qui illuminent des carrés de couleur. C'est ce Mondrian-là qui reste à jamais marqué dans le regard. Une grille de lecture simple, évidente, qu'il décline sans faille. Brillamment.S'il a participé un temps à « De Stijl », Mondrian s'en est assez vite séparé, en désaccord avec Van Doesburg. On découvre aussi l'oeuvre de cet artiste dans cette exposition. Il veut dépasser le cadre même de la peinture pour appliquer ses théories à la construction d'immeubles, à l'aménagement d'appartements, au design de meubles et d'objets. Il est d'une modernité absolue.Jean-Louis Pinte Au Centre Georges-Pompidou jusqu'au 21 mars. Tél. : 01.44.78.12.33. www.centrepompidou.fr. Catalogue éditions Centre Pompidou, 49,90 euros.
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