L'or monétaire brille toujours

La cabale contre le dollar menée par les pays émergents sous la houlette de la Chine a fait resurgir un vieux fantasme. Celui du retour à l'étalon or, ou tout du moins à un étalon basé sur un panier de matières premières et de monnaies où le métal jaune aurait une place éminente. Le seul fait de laisser entendre cette semaine que les pays du Golfe envisageaient à terme de remplacer le dollar pour l'indexation des prix du pétrole par un panier de monnaies dont l'or serait partie prenante a contribué à la flambée du prestigieux métal. Tout comme cette croisade a renforcé son statut de valeur refuge, puisqu'elle a pour but de mettre fin à l'hégémonie du seul dollar.Hégémonie qui dure depuis le 15 août 1971, lorsque le président des États-Unis, Richard Nixon, décida unilatéralement de rompre la libre convertibilité du dollar en or. John Maynard Keynes, pourtant l'un des pères fondateurs des accords de Bretton Woods, qui prétendaient que « le dollar était aussi bon que l'or » (« as good as gold »), dénonça en son temps la « relique barbare ». Il doit se retourner dans sa tombe. Pour les banques centrales, qui gardent jalousement leur encaisse métallique, l'or est tout sauf une relique. Il est même leur trésor de guerre privilégié en temps de crise. Quelque 30.000 tonnes d'or dorment dans les coffres des banques centrales, soit le quart de la production extraite dans le monde depuis la nuit des temps. Un moment tentées de réduire leur encaisse métallique, les gardiennes du temple monétaire ont vite battu en retraite. Lorsque la Banque d'Angleterre annonce, à la fin de l'été 1999, la mise en vente prochaine de la moitié de son stock de 715 tonnes d'or, un vent de panique s'empare du marché. Le cours de l'once d'or tombe à 250 dollars. Pour enrayer sa chute, dès la fin septembre de la même année, douze pays signent les accords de Washington limitant les cessions autorisées des banques centrales participantes à 500 tonnes par an pendant cinq ans. Renouvelé à trois reprises, l'accord a ramené cette année le montant cessible à 400 tonnes par an d'ici à 2014.Mais les banques centrales signataires ne vendent plus, ou presque plus ; elles conservent au contraire jalousement leur encaisse. Théoriquement démonétisé lors des accords de la Jamaïque de 1976, le métal n'a jamais perdu son pouvoir de séduction auprès des instituts d'émission : l'or monétaire a encore de beaux jours devant lui. Gageons que les 403,3 tonnes de son encaisse que le FMI projette de vendre trouveront preneur auprès? des banques centrales. Toutefois, pour que l'or redevienne l'unité de compte d'une économie mondialisée, qu'il parvienne à réaliser l'équilibre entre la masse monétaire mondiale et le commerce international, il faudrait que son cours atteigne des niveaux infiniment plus hauts. Isabelle Croizard
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