Ne vous fiez pas au titre de l'édition française du dernier roman de Louis de Bernières... « Un immense asile de fous » n'est pas une nouvelle charge vengeresse contre nos voisins d'outre-Manche. Car, malgré son patronyme français, l'auteur est un sujet britannique pur jus ! Romancier à succès auteur de sept livres, dont « la Mandoline du capitaine Corelli », l'écrivain s'est rendu compte que la vie d'un petit village du Surrey, très inspiré de celui où il a grandi, pouvait donner matière à une oeuvre originale. L'exotisme est au coin de la rue, comme se plaît à le rappeler le romancier. Et avec ce recueil de nouvelles, il nous régale d'un savoureux cocktail de doux dingues, d'ados déboussolés, de militaires loufoques ou de pasteur en mal de sermon. On rit beaucoup à la lecture de ces histoires qui mettent souvent en scène la délicate cohabitation entre les hommes et les animaux. Un fan de golf rêve de transformer son jardin en green. C'est sans compter une armada de taupes qui laboure son gazon. Une femme passe son temps à tirer à la carabine sur les écureuils, « ces rats à grosse queue ». Un jeune garçon rêve d'une pêche miraculeuse pour débarrasser un étang paisible d'un brochet trop envahissant. Certains personnages ne sont qu'esquissés mais prêtent à sourire : tel ce cantonnier digne d'un M. Hulot qui apparaît au détour de nombreuses nouvelles avec, à chaque fois, un objet insolite sorti d'un fossé « dans l'attitude d'Hamlet tenant le crâne de Yorick ».Louis de Bernières offre aussi un regard complice et tendre sur ses personnages. C'est John, le jardinier du haras, qui couve d'un oeil désabusé la naissance d'une idylle entre un étudiant et une belle palefrenière. Ou Jack Oak, le dernier paysan du village, qui vend à contrecoeur sa chaumière natale à un riche Londonien. La nostalgie et la mort rôdent aussi dans ces courts chapitres où le romancier se fait le chantre d'un monde rural ébranlé par la modernité. Une évocation attachante servie par la plume alerte et fluide du grand romancier anglais. Laurent Pericone« Un immense asile de fous. Récits d'un village anglais », de Louis de Bernières. Mercure de France, 330 pages, 23,80 euros.

latribune.fr

10 Jan 2011, 23:24

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