à Bruxelles, le duel Microsoft-Google se joue par lobbies interposés

Quand, le mois dernier, la Commission européenne a confirmé le dépôt de trois plaintes contre Google, l'idée que le moteur de recherche le plus populaire de la planète serait la prochaine victime expiatoire des experts européens de la concurrence n'a pas tardé à s'imposer. Après Microsoft, qui a alimenté la chronique des années 2000 et détient le succès de l'entreprise la plus mise à l'amende par les Européens, c'était au tour d'un autre quasi-monopole global de tomber. L'histoire devint encore plus savoureuse quand on découvrit que Microsoft soutenait indirectement au moins deux des plaintes qui visent Google. Début mars, la fondatrice de Foundem reconnaissait qu'elle avait trouvé un appui utile auprès d'une de ces coalitions d'intérêts typiques du paysage de l'influence bruxellois, IComp, laquelle s'avéra sponsorisée par Microsoft. Le deuxième plaignant, le site Ciao, est dans le giron de Bing, le moteur de recherche de Microsoft. Le troisième, le site de textes juridiques ejustice.fr, une Sarl au capital de 50.000 euros, est tout aussi peu capable que Foundem d'assumer les coûts juridiques astronomiques de plusieurs années de procédure contre Google. La taille des plaignants tranche avec la procédure contre Microsoft, soutenue à l'origine par des géants comme Sun Microsystems, IBM ou Oracle. Certes, l'association IComp, créée en 2007 pour batailler contre le rachat de DoubleClick par Google (qui sera finalement validé), n'affiche pas un budget (« entre 50.000 et 100.000 euros ») de nature à réellement financer une bataille juridique complexe contre Google. Il est vrai que les règles de déclaration du registre des lobbyistes de la Commission excluent les dépenses directement liées à une procédure judiciaire.Détail croustillant, le secrétariat de cette association est assurée par le cabinet de relations publiques Burson Marsteller qui fut, jusqu'il y a quelques mois le conseil d'une autre officine : l'European Committee for Interoperable Systems (ECIS). ECIS, aujourd'hui moins actif, fut pendant des années le catalyseur de l'opposition à Microsoft, alors que le géant de Redmond tentait de briser le front des plaignants de l'intérieur en multipliant les règlements amiables. Estimant que la « muraille de Chine » supposée entre les deux clients n'était pas assurée, ECIS a lâché Burson l'an dernier pour un autre consultant... travaillant lui-même pour Yahoo, récemment repris par Microsoft !L'affrontement entre les deux géants implique bien d'autres forums et associations diverses. Microsoft déclare participer à pas moins de 33 associations. Il y en a au moins une 34e : l'Open Computing Alliance, créé en juin 2009 à Londres pour travailler notamment sur les questions de concurrence, d'accès au réseau, et d'interopérabilité. L'OCA cherche à s'imposer comme une des caisses de résonnance de la problématique de l'informatique à distance (le « cloud computing ») qui commence à peine à émerger dans le débat européen. « Nous avons eu des discussions avec Google » et d'autres et « accueillerions favorablement une plus grande implication de leur part », assure son secrétaire général Tim Cowen. Les arguties juridiques bruxelloises cachent les enjeux bien plus lourd de la bataille commerciale que se livrent Microsoft et Google. En bon stratèges, ils savent aussi s'allier sur d'autres sujets. Ils coopèrent par exemple au sein d'EDIMA, un regroupement d'industriels, également basé à Londres, spécialisé dans dans le lobbying pour la propriété intellectuelle.
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