« Il faut revoir le traité de Lisbonne, qui est profondément réactionnaire »

La solidarité des Européens à l'égard de la Grèce ne renforce-t-elle pas la crédibilité de la zone euro ?La Grèce n'est pas, du point de vue de son endettement, dans une situation plus difficile que l'Italie ou la Belgique, et son économie, en termes de PIB, pèse peu (3 %) en Europe. Les agences de notation, en lançant la curée contre ce pays, et plus généralement contre la zone euro, exploitent les faiblesses de la zone euro : son hétérogénéité économique, et surtout la sur- évaluation de l'euro et la faiblesse de la croissance moyenne, plombée par la politique déflationniste de l'Allemagne.Les textes européens interdisent pourtant l'éventualité d'un plan de sauvetage de la Grèce par les États membres...Évidemment, le traité de Lisbonne est idiot. Son article 123 interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales nationales d'accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions européennes et aux États. Or c'est exactement ce qu'ont le droit de faire la Réserve fédérale américaine ou la Banque d'Angleterre : ne faudrait-il pas, dans certaines limites, s'affranchir de cet article ? En fait, on ne compte plus la liste des dispositions du traité rendues caduques par la crise. Il est vraiment temps de revoir ce traité, profondément réactionnaire.En même temps, cette crise grecque rend l'euro plus compétitif...Elle a fait tomber le taux de change de l'euro de 1,50 à 1,36 dollar : en tout mal, son remède ! Mais c'est trop peu ! L'euro, surévalué, est devenu un lourd handicap pour nos exportations. Il favorise les délocalisations.L'euro est donc responsable de la panne de croissance européenne ?Oui, car il faut se rappeler que l'Allemagne, en 1991, a imposé à ses partenaires ses dogmes et ses choix, lors de la création de l'euro qui est, en fait, un mark bis. Aujourd'hui, l'activité économique dans la zone euro est en outre plombée par la politique salariale et budgétaire déflationniste de l'Allemagne... Certes, celle-ci affiche un excédent commercial confortable, mais ce surplus se fait pour les trois quarts au détriment des autres pays européens.Qu'est-ce qu'il faudrait alors changer dans le fonctionnement de l'euro ?Il y a deux sujets à mettre sur la table : la politique de la Banque centrale européenne, en intégrant la croissance et l'emploi dans ses statuts ; et l'élaboration d'une initiative européenne de croissance, qui pourrait prendre la forme d'un grand emprunt européen.De quelle façon procéder ?Si nous n'agissons pas rapidement, nous irons vers des difficultés grandissantes : après la Grèce, ce sera le tour du Portugal, de l'Espagne ou de l'Italie, et nous risquons d'assister à l'éclatement de la zone euro, ce que je ne souhaite pas. Il faut donc organiser une nouvelle conférence européenne institutionnelle, pour revisiter de fond en comble le traité de Lisbonne et promouvoir, à travers un gouvernement économique de la zone euro, une politique de croissance européenne. Propos recueillis par éric Chol (*) Sénateur du Territoire de Belfort, président du Mouvement républicain et citoyen. Jean-Pierre Chevènement (*)
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