Riche en capitaux, le pays pourra une nouvelle fois financer seul sa reconstruction

Le Japon pourra-t-il financer sa reconstruction ? S'il est trop tôt pour estimer son coût, il s'annonce très supérieur aux 100 milliards de dollars qu'avait coûté la reconstruction de Kobé. Or le Japon est déjà le pays développé le plus endetté au monde, avec une dette publique totale de plus de 11.100 milliards de dollars à fin 2010, soit, selon le FMI, 226 % de son PIB. Ce qui avait conduit, il y a peu, le FMI à enjoindre Tokyo de réduire son endettement. Et l'agence de notation S&P à dégrader sa dette publique à court terme. Devant la pression extérieure, le premier ministre démocrate, Noato Kan, avait dû affirmer qu'une réforme fiscale était nécessaire, et qu'un doublement de la TVA était même envisageable. « Si à quinze jours de la fin de l'exercice fiscal 2010, le budget 2011 n'est pas encore voté, il est clair que le séisme va remettre en cause, au moins à court terme, les efforts de consolidation budgétaire du gouvernement Kan, étant entendu qu'il ne peut répéter l'erreur de 1997, quand il releva la TVA alors que l'économie était encore très fragile », estime Evelyne Dourille-Feer, spécialiste du Japon au Cepii. Sa situation budgétaire est donc très tendue. Il n'empêche que la troisième puissance mondiale pourra encore aujourd'hui financer seule sa reconstruction. D'abord, explique Sylvain Broyer, chez Natixis, « en tant que troisième exportateur de capitaux au monde, son endettement net de ses créances n'est plus que de 114 % de son Pib. Cela signifie que le Japon dispose de capitaux considérables investis à l'étranger, prêts à être réalloués pour financer l'effort national de reconstruction, comme ce fut le cas pour la reconstruction de Kobé en 1995. » Un mouvement qui expliquait lundi la remontée du yen contre le dollar. Ensuite, remarque encore Evelyne Dourille-Feer, « le Japon ne dépend pas des investisseurs étrangers pour financer sa dette publique : 95 % de ses dettes sont détenues par des résidents, et parmi celles-ci, plus de la moitié le sont par des institutions financières publiques, sachant que le stock d'épargne des résidents japonais est encore considérable, à plus de deux fois le PIB. Aussi, malgré un niveau d'endettement public très élevé, le Japon parvient-il toujours à trouver preneur pour ses obligations souveraines à des taux entre 1,2 % et 1,3 %. Des taux si bas qu'ils lui assurent un service de la dette beaucoup moins lourd qu'il y a quinze ans. » Enfin, il ne faut pas oublier que la Banque centrale du Japon dispose de réserves de change considérables : plus de 1.000 milliards de dollars à fin 2010, selon le FMI. Un trésor de guerre qui lui permet déjà d'assurer la liquidité des banques et d'acheter des actifs à la Bourse de Tokyo. Et qui lui permettra, comme elle l'a déjà fait dans le passé, d'acheter les obligations qui seront émises par le gouvernement pour financer la reconstruction. Aujourd'hui et pour dix ans encore, le Japon n'a besoin de personne. « C'est lorsque le taux d'épargne national deviendra négatif, avec l'arrivée à la retraite de cohortes nombreuses et disposant d'une faible pension, qu'il devra faire appel aux investisseurs étrangers », pronostique Evelyne Dourille-Feer. Voilà pourquoi, une fois la reconstruction achevée, il devra coûte que coûte s'attacher à réduire son déficit. Valérie Segond
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