Les coulisses de l'arrivée de Louis Vuitton au Liban

Ce soir, le tout-Beyrouth sera sur son trente et un. Personnalités politiques, starlettes, hommes d'affaires influents... Il seront plusieurs centaines à l'inauguration du magasin Louis Vuitton de la rue Allenby, puis au dîner avec happening du jeune artiste local, Marwan Rechmaoui. Ce sera la première boutique ouverte par la pépite de LVMH au Liban. Et un point d'orgue pour le tout nouveau complexe commercial de luxe, Souks de Beyrouth, reconstruit pour 100 millions de dollars par le groupe immobilier Solidere sur le plan des anciens souks de la ville, détruits par la guerre. « Louis Vuitton est la Locomotive avec un grand L que tous attendent », explique Guillaume Boudisseau, patron de la société de conseil en immobilier Ramco à Beyrouth. Pour une fois, la marque aux 5 milliards d'euros de chiffre d'affaires arrive après ses rivales. Mais contrairement aux Gucci, Cartier ou Prada, qui ont tous signé des accords de partenariat avec des franchisés locaux, Louis Vuitton s'aventure seul. « Nous allons partout par nos propres moyens, les autres nous prennent pour un drôle d'animal mais préfèrent nous avoir près d'eux qu'à l'autre bout de la ville », s'amuse Yves Carcelle, le président de Vuitton. Selon lui, les avantages de faire cavalier seul sont évidents. La marque maîtrise son image, sa base de données clients, ses assortiments et investit dans la formation de son personnel, aux carrières très internationales. Mais l'option présente aussi des inconvénients. A commencer par la lenteur. Les équipes de prospection maison ont tourné dix ans avant de trouver un emplacement convenable et lorsqu'elles étaient enfin prêtes à signer en 2006, la guerre avec Israël a retardé le projet de quatre ans supplémentaires. « L'instabilité politique est la plus grosse menace mais nous leur donnerons un coup de main avec plaisir si ça recommence », propose Tony Salamé, PDG d'Aïshti, le groupe libanais ayant le plus de contrats de franchise dans le luxe. Le risque est aussi financier puisque Vuitton assume l'intégralité des investissements. Tony Salamé, lui, a investi 15 millions de dollars à la place de ses clients pour une quinzaine d'ouvertures de boutiques cette année. « Toutes les marques ne pourraient pas faire comme Vuitton car elles n'ont ni sa structure ni son réseau social », continue le patron d'Aïshti.diversification lenteMais pour Vuitton, le pays en vaut la peine. Surnommé le « Paris du Moyen-Orient » dans les années 1960, Beyrouth redevient un centre du luxe, juste derrière Dubai. Les ventes de sacs, montres et autres y grimpent de 15 % par an depuis trois ans, certains clients n'hésitant pas à dépenser 200.000 dollars par saison. La clientèle est multiple, locale mais aussi issue de la diaspora libanaise, qui revient chaque été, et renforcée par les touristes du Golfe. « On ne trouve plus une place de libre cet été dans les avions entre Beyrouth et Doha, Bahreïn, Riyad ou Dubai. », note Yves Carcelle. Pourtant, ici pas de grand temple comme à Londres ou Paris. La boutique mesure 470 mètres carrés et sera dirigée par une libanaise, Hala Matta, ayant travaillé chez Vuitton à Paris et Dubai. La construction (pendant six mois) a été prise en main par l'un des 35 architectes maison, comme pour les boutiques de Pologne, Saint-Tropez ou République dominicaine, inaugurées cette année. La diversification aussi mûrit lentement. Après les lunettes, les chaussures et les bijoux, la marque devrait bientôt concevoir son premier parfum. Mais elle jouera à nouveau les cavaliers solitaires en le vendant uniquement dans ses propres boutiques.
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