Lucia Etxebarria ? : « La Movida est un mythe »

«Il me faudrait des heures pour vous expliquer la genèse de ?Sex & Love Addicts?. Et il y a des choses que je ne dis qu'à mon psy », s'excuse Lucia Etxebarria. Reste que son dernier roman étonne et captive d'emblée. Par sa construction en mosaïque tout d'abord. Une dizaine de personnages évoquent Pumuky le leader charismatique d'un groupe de rock alternatif, mort d'une balle dans la tête. Suicide?? Meurtre?? Qu'importe. Aux ressorts du polar, la romancière a préféré la complexité des rapports humains. D'autant qu'elle a une folle capacité à transformer des clichés éculés en vérités universelles profondes. C'est rock, incorrect. À l'image de cette écrivain madrilène. Comment est né le personnage de Pumuky??J'ai emprunté à des personnes que j'ai connues. En même temps, Pumuky représente l'archétype de l'artiste narcissique et névrotique. Je n'écris jamais sur des choses que je ne connais pas. Mais je déteste parler de moi. Cette tendance autocentrée des écrivains français d'évoquer leurs petits problèmes bourgeois m'exaspère. Disons que là, j'avais envie de travailler sur la manière dont nous sommes tous manipulés par la société du spectacle. Ce roman comporte beaucoup de références à la France...Pumuky et ses amis ont tous lu Debord ou Baudrillard. Il fallait donc qu'ils aient un lien avec la France pour que ça soit crédible. Pour ma part, j'ai été très influencée par le structuralisme et les philosophes de l'Hexagone. Alors je me sens une dette envers la France dont je parle la langue grâce à ma mère, à moitié belge. Vous évoquez la scène underground madrilène à travers ce roman. À quoi ressemble-t-elle??À rien. Aujourd'hui, c'est le Parti populaire de droite qui gouverne la communauté de Madrid. Toutes les subventions destinées à la culture ont été coupées. Il est pratiquement impossible d'ouvrir un bar et encore plus de monter un concert. Nous avons le taux de consommation de drogue le plus élevé du monde. Il y a quelque chose de schizophrénique entre le vrai visage de Madrid et celui qu'elle offre à l'extérieur. En même temps, cette cité est addictive. On peut parler avec qui on veut à Madrid et les enfants sont rois. Les Arabes nous ont légué ce sens de la convivialité. Et la Movida, alors, il n'en reste rien??Mais c'est un mythe?! À part la photographe Ouka Lele et Pedro Almodovar, citez-moi d'autres membres de ce supposé mouvement. Il n'en existe pas. J'entretiens une relation très forte avec Ouka Leele. C'est une femme sublime, magnétique. Elle irradie. Elle m'a d'ailleurs inspiré le personnage de Sabina dans « Sex & Love Addicts ».Propos recueillis à Madrid par Y. Y.
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