L'époisses : Une belle et forte personnalité

Avec le maroilles et le munster, il fait sans doute partie des fromages les plus odorants. « Il faut être force de persuasion pour le faire goûter aux clients qui ne le connaissent pas?! » raconte, tout sourire, Patrick Bertron, le chef du Relais Bernard-Loiseau à Saulieu (Côte-d'Or). En bouche cependant, sa pâte fine et souple, onctueuse dès lors qu'elle a été laissée au repos hors du frigo, est « tout en subtilit頻, souligne-t-il, développant des notes, légères, de fruits secs qui s'épanouissent au fur et à mesure et dévoilent une belle personnalité.L'époisses - c'est ce qui fait sa particularité - est le dernier fromage d'appellation à caillé lactique et à croûte lavée. Seuls les laits de trois races de vache sont autorisés?: la Brune, la Montbéliarde et la Simmental française. Durant la période de maturation, ou d'affinage, qui dure jusqu'à deux mois, il est l'objet de toutes les attentions, lavé de une à trois fois par semaine, avec une eau progressivement enrichie... au marc de Bourgogne. La couleur orangée de sa croûte est naturelle - elle est due à des bactéries - car l'utilisation de colorants est strictement interdite.Sa recette, qui aurait été créée au XVIe siècle par des moines installés à Époisses, a failli se perdre dans les décombres de la Seconde Guerre mondiale. Alors que plus de 200 fermes le fabriquaient, à la fin du XIXe siècle, l'Auxois, son berceau, n'en comptait plus que deux quand, en 1956, Robert Berthaut a décidé d'en relancer la production. Aujourd'hui, la fromagerie Berthaut est sans conteste leader sur ce marché de niche qui n'absorbe guère qu'un gros millier de tonnes par an. Mais cette entreprise laitière qui emploie 75 salariés à Époisses même (Côte-d'Or), réalise à elle seule 50 % de la production (pour près de 10 millions d'euros de chiffre d'affaires). Le reste est assuré par trois opérateurs?: la fromagerie Gaugry, la fromagerie Germain et, seul fermier en lice, le Gaec des Marronniers.Si la recette traditionnelle le veut au lait cru, l'époisses s'est adapté aux règles du marché mondial, en adoptant le lait pasteurisé ou simplement chauffé, du moins pour une part de la production. Berthaut comme Gaugry exportent jusqu'à 30 % de leurs époisses. Au-delà des frontières, il a séduit des inconditionnels, comme l'écrivain américain Jim Harrisson. « Helmut Kohl était lui aussi fan, raconte Jean Berthaut, le fils de Robert, aujourd'hui à la tête de l'entreprise familiale. Un jour où il est venu déjeuner avec François Mitterrand, à L'Espérance, à Saint-Père-sous-Vézelay, Marc Meneau m'a appelé, désespéré. Il n'avait plus assez de fromage et il craignait le scandale. J'ai dû monter une opération éclair pour le livrer?! »
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