Fiscalité du patrimoine : les risques de la réforme

À vouloir se débarrasser à tout prix d'un boulet ingérable politiquement, Nicolas Sarkozy ne va-t-il pas s'en créer d'autres, tout aussi lourds à porter à un an de la présidentielle ? En confirmant mardi son intention de supprimer le bouclier fiscal, et donc l'impôt sur la fortune (ISF), le chef de l'Etat a pris des risques. Risque politique d'abord. On s'en souvient, Jacques Chirac avait supprimé l'impôt sur les grandes fortunes (IGF) en 1987. Un an plus tard, il avait perdu la présidentielle face à François Mitterrand, et avait acquis la certitude que cette suppression lui avait coûté l'élection. La situation est certes différente aujourd'hui. Créé en 1989, l'ISF a déjà été bien écorné depuis 2003. Il sera surtout supprimé en même temps que le bouclier fiscal, symbole honni d'injustice. Et remplacé par un impôt « sur les revenus et les plus-values du patrimoine ». Pour l'heure, la majorité UMP se réjouit donc avant tout de ne plus avoir à porter le fardeau du bouclier. Auteur de l'amendement au projet de loi de finances supprimant l'ISF et le bouclier (qui avait rassemblé un tiers des députés UMP), Michel Piron s'est déclaré mercredi « très satisfait de voir repris nos principes ». Le risque économique n'est pas moins grand. Il s'agit de récupérer les 4 milliards d'euros que rapportait l'ISF (moins les 700 millions du bouclier). Voire plus, puisque le gouvernement s'est engagé à réduire encore le déficit en 2012. Et tout cela sans augmenter les impôts. IncertitudesOù sont les marges de manoeuvre ? Le projet de loi de finances 2011 et la réforme des retraites ont déjà relevé la taxation des plus-values mobilières et immobilières (19 % plus 12 % de prélèvements sociaux). Dans leur amendement, les députés UMP augmentaient encore de huit points ces prélèvements, pour un gain de 3 milliards d'euros. Mais les fiscalistes estiment que les marges de manoeuvre sont faibles : « Le niveau d'imposition des plus-values en France est déjà élevé par rapport aux autres pays européens », affirme-t-on ainsi à la banque suisse UBS. Une autre piste est de revoir les abattements qui s'appliquent aux revenus et plus-values du patrimoine. Mais là encore la marge n'est pas à la hauteur des enjeux. Restent des solutions qui fâchent : revoir la fiscalité de l'assurance-vie, produit populaire s'il en est. Toucher à la transmission du patrimoine, celle-là même qui avait été allégée en 2007. Ou aligner la fiscalité des revenus du patrimoine sur ceux du travail, en les intégrant au barème de l'impôt sur les revenus. Une sorte de bombe dans le milieu feutré de la finance. « Cela entraînerait un alourdissement de la fiscalité du patrimoine de près de 20 points », s'alarment déjà les fiscalistes d'UBS.
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