Un secteur bancaire surdimensionné

« Stress tests », Bâle III, durcissement de la régulation... Tous les efforts déployés par l'Europe pour prévenir une nouvelle tempête bancaire paraissent bien dérisoires à la lumière de la crise irlandaise. En juillet dernier, les deux principales banques (non entièrement nationalisées) du pays, Allied Irish Bank et Bank of Ireland, fraîchement recapitalisées, passaient les « stress tests » avec succès. Fin septembre, soucieux de renforcer les fonds propres de ses banques, l'État injectait 13 milliards d'euros supplémentaires, portant à 46 milliards le montant total de la recapitalisation. Et, dans un effort de transparence, indiquait qu'il lui en coûterait 5 milliards d'euros supplémentaires, si la situation devait davantage se détériorer.Le problème ? Ni les autorités irlandaises ni les architectes des « stress tests » n'avaient prévu que les marchés continueraient à douter. Mais la Nama (la structure de défaisance irlandaise) appliquant des décotes toujours plus élevées aux actifs qui lui étaient apportés, en raison de la baisse de l'immobilier, ces derniers se sont mis à anticiper de nouvelles pertes. Et les marchés ne détestant rien plus que l'incertitude, ils ont alors préféré anticiper le pire.« À partir de ce moment-là, le choix radical de l'État irlandais de garantir l'ensemble du système bancaire le mettait gravement en danger », explique Cyril Regnat, stratégiste chez Natixis. Et pour cause. La garantie en question porte sur 480 milliards d'euros, alors même que le PIB du pays est seulement de 164 milliards.Ici, la racine du mal n'est donc pas une régulation ou une supervision défaillantes, ni même un endettement public excessif, mais le surdimensionnement du secteur bancaire. Confrontée à une situation similaire, l'Islande n'a pas pu sauver son système bancaire. En Suisse, les déboires d'UBS ont amené le régulateur, après que l'État fut intervenu financièrement, à être beaucoup plus exigeant qu'ailleurs. La dépendance des banques irlandaises aux financements de la BCE donne également une idée de ce surdimensionnement : elle a atteint 130 milliards d'euros au plus fort de la crise des dettes souveraines. « Il s'agit d'un problème de coordination politique au niveau européen. Cela va bien au-delà de la régulation du système bancaire », estime l'économiste de Royal Bank of Scotland, Silvio Peruzzo, comparant les engagements pris par l'État irlandais et le niveau d'imposition extrêmement bas offert aux entreprises qui s'implantent dans le pays. « Qu'il s'agisse de l'Irlande, de l'Espagne ou de la Grèce, ces pays affichaient des taux de croissance importants avant le début de la crise financière, mais ils n'ont pas réussi à tirer suffisamment de recettes fiscales de cette croissance », explique-t-il.
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