Tous blanchis, tous gagnants, et tant pis pour les soupçons. Voilà ce qu'on pourrait penser après la décision de l'AMF, l'Autorité des marchés financiers, sur le dossier EADS. La relaxe générale finalement décidée laisse un goût amer. Si c'était pour en arriver là, pourquoi avoir laissé se mener une procédure aussi lourde, qui a terni la réputation d'importants dirigeants européens, de l'une des plus grandes firmes du continent, EADS, d'un de ses fleurons industriels Airbus, fragilisant une fois de plus son ciment originel franco-allemand ? Dans cette affaire, il n'y a finalement que des perdants. Arnaud Lagardèrerave;re, qui avait affirmé préférer passer dans ce dossier pour un incompétent plutôt que pour un malhonnête, a beau se féliciter d'être blanchi, sa réputation en sort ternie. Comme celle de tous les autres protagonistes. Les dirigeants coactionnaires d'une grande entreprise sont comme la femme de César : ils ne doivent pas pouvoir être soupçonnés. Les petits porteurs, qui avaient vu brutalement plonger le cours de l'action EADS après les révélations sur les retards et les surcoûts du grand Airbus A380, n'ont pas forcément été convaincus par le verdict du gendarme français de la Bourse et de la finance. D'autant que pendant plusieurs mois, des fuites savamment orchestrées avaient distillé les accusations à peine voilées des enquêteurs de l'AMF et les fortes suspicions pesant sur les présumés coupables. L'écart entre ces « informations » et le résultat officiel de l'enquête suscite le malaise. L'AMF a-t-elle été finalement bâillonnée, soulignant ainsi la nécessité de voir se renforcer ses pouvoirs d'enquête et de sanction, ou au contraire a-t-elle voulu imprudemment montrer sa pugnacité avant de réaliser qu'elle se heurtait au vide du dossier ? Sa gouvernance interne et ses méthodes ne ressortent pas indemnes de cette procédure. [email protected] OLIVIER PROVOST

latribune.fr

19 Déc 2009, 1:42

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