Qui a tué la consommation de viande de cheval ?

Aujourd\'hui martyrisée par le scandale des lasagnes, quel avenir aura la viande de cheval? Sa consommation est déjà marginale: selon les chiffres de FranceAgriMer, la consommation de viande de cheval ne concerne que 0,4% de la consommation de viande dans l\'Hexagone. En Europe, ce chiffre tombe à 0,2%.\"En Europe, à partir de 1733, la consommation de viande de cheval était interdite par l\'Eglise\", relate Jean-Pierre Poulain, professeurs des universités à Toulouse II, spécialiste des dimensions sociales et culturelles de l\'alimentation. \"Il s\'agit de différencier la chrétienté des Mongols, avoir une posture civilisée\". La viande de cheval n\'est alors consommée qu\'en cas de nécessité: famines, guerres,...La viande réhabilitée par la... SPAPuis la viande de cheval tente de se réhabiliter à partir de la moitié du XIXème siècle. \"Economiquement, parce que la viande est peu chère et nutritionnelle\", explique le sociologue, qui ajoute que les écoles vétérinaires organisaient des banquets hippophagiques. Par rébellion aussi: \"à cette époque, manger du cheval, c\'est un peu bouffer du curé\". Mais également pour le bien-être de l\'animal: \"la SPA demande à commercialiser la viande de cheval pour gérer les bêtes qui, trop vieilles et devenues inutiles aux champs, n\'étaient plus prises en charge. Le but étaient qu\'elles meurent dans des conditions décentes\".La consommation de viande de cheval se banalise au début du XXème siècle, \"poussée par la mécanisation dans l\'agriculture et par l\'arrivée de la voiture\", poursuit Jean-Pierre Poulain. Aujourd\'hui ce sont les mêmes évolutions qui sont à l\'oeuvre en Europe de l\'Est.Un steak de cheval par semaineArrivent les années 1960, l\'âge d\'or des boucheries chevalines. \"Quand j\'étais jeune, je mangeais un steak de cheval par semaine, et c\'était commun\", se souvient Jean-Pierre Poulain.Puis le cheval n\'a plus la côte dans les cuisines. De 1,78 kilo de consommation moyenne par Français et par an dans les années 1975-1979, il est passé à 340 grammes entre 2005 et 2009 selon les calculs de FranceAgriMer. \"Petit à petit, le cheval est devenu un animal de compagnie, dans les manèges par exemple\", explique le sociologue.Des consommateurs âgésAujourd\'hui, les mangeurs de cheval sont âgés de plus de 50 ans, selon les professionnels du secteur. Ils soulignent que le Nord est la région qui compte le plus de mangeurs de cheval: 30% de ses habitants en consommaient en 2011. En volume cependant, l\'Ile-de-France est devant, avec 30% de la viande de cheval achetée en 2011. Ce sont essentiellement les classes moyennes inférieures qui consomment du cheval. Une habitude alimentaire qui permet l\'existence de 800 boucheries chevalines et de 40.000 éleveurs en France selon Interbev.Pas pour les BritanniquesLa viande de cheval n\'intéresse cependant pas les Britanniques. \"L\'Angleterre n\'a pas connu ces campagnes de promotion du cheval que nous avons eu en France\", souligne Jean-Pierre Poulain. \"L\'animal y est toujours approché comme un animal domestique\", et le scandale a provoqué un choc émotionnel.Mais la France n\'est pas la seule à avaler de la viande de cheval. En Europe, l\'Italie est le principal producteur. Elle en produit près de 25.000 tonnes, suivie par la Pologne et l\'Espagne, puis par la France, avec 4.500 tonnes.Et aujourd\'hui, qui dit que les consommateurs, poussés par la curiosité, ne passeront pas la porte d\'une boucherie chevaline? \"Cela ne se fera pas tout seul, estime le sociologue, les professionnels devront travailler sur l\'image de la viande de cheval\". Et d\'ajouter que la viande n\'est \"pas trop chère en ce moment\". Samedi, sur les marchés et dans les boucheries, France 2 constatait ainsi que la consommation de cheval repartait à la hausse.
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