bonnes nouvelles

livresLe premier a grandi au Maroc. Le second dans une famille juive orthodoxe de l'État de New York. A priori, tout sépare Fouad Laroui de Shalom Auslander. Si ce n'est une extraordinaire capacité à raconter leur monde d'origine avec un humour décapant comme en témoignent leur recueil de nouvelles respectif, « Le jour où Malika ne s'est pas mariée » (Julliard) et « Attention Dieu méchant » (Belfond).Les histoires de Fouad Laroui (« les Dents du topographe », Julliard, 1996) nous plongent dans la société marocaine des eighties sur lesquelles plane l'ombre de Hassan II. Les femmes commencent alors à prendre leur indépendance au grand dam des hommes accrochés à leurs pouvoirs traditionnels. La corruption est de rigueur, la presse forcément aux ordres du palais, et l'arabisation sur le point de faire des ravages. Il suffit par exemple d'une circulaire du ministère de l'Éducation nationale sur la couleur intraduisible d'un protège-cahier pour mettre la ville d'El Jadida à feu et à sang.sens de l'absurdeCes nouvelles captivantes, surréalistes et pourtant si vraies, d'une drôlerie à toute épreuve mais néanmoins mélancoliques voire nostalgiques de cette époque, sont contrebalancées par d'autres, tragiques, qui mettent en scène de jeunes Marocains chez eux ou à l'étranger.Pour raconter les siens, Fouad Laroui (qui écrit en français) parvient à merveille à retrouver la truculence du dialecte marocain, ses métaphores échevelées, et surtout un sens puissant et salvateur de l'autodérision.Bernard Cohen, l'un des plus grands traducteurs de l'anglais vers le français réussit, lui, à retranscrire à la perfection la langue de Shalom Auslander (« la Lamentation du prépuce », Belfond, 2007). Cet humour juif ravageur, ce sens de l'absurde poussé à l'extrême pour raconter des hommes tétanisés par la religion. L'auteur ose tout. Donner une conscience aux singes, faire parler des hamsters envahis par le doute, se moquer des saintes écritures, donner la parole à un Dieu très humain. Et râleur avec ça. Ça se veut blasphématoire, c'est kafkaïen, mais surtout très littéraire. Car Auslander, comme Laroui, imposent une voix, un ton, une langue bien à eux, qui éclatent avec bonheur dans ces nouvelles. Yasmine Youssi« Le jour où Malika ne s'est pas mariée », Fouad Laroui, Julliard, 206 pages, 17 euros.« Attention Dieu méchant », Shalom Auslander, Belfond, 170 pages, 18,50 euros.
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