Fiscaliser les données, l'idée (trop ? ) ambitieuse du rapport Colin et Collin

Voilà qui devrait donner l\'occasion au gouvernement, aux parlementaires, et au conseil national du numérique nouvellement nommé de se gratter la tête. En charge d\'un rapport sur la fiscalité du numérique remis ce vendredi 18 janvier, l\'Inspecteur des finances Nicolas Colin et le conseiller d\'Etat Pierre Collin ont fait des recommandations pour le moins ambitieuses pour taxer les géants du Net. Outre les classiques recommandations de révision des conventions fiscales au niveau européen, ils suggèrent de «taxer les données».Le constat: Facebook, Google, Amazon ou Apple, ne déclarent quasiment pas de bénéfices et ne paient presque aucun impôt en France. Comment y remédier? Le duo part d\'un postulat: si l\'économie numérique se développe aussi vite, c\'est notamment grâce aux informations transmises par les internautes. «Les données issues de l\'activité des utilisateurs sont cette base commune à l\'ensemble de l\'économie numérique», indique le rapport. L\'internaute fait des recherches sur Google et clique sur les liens sponsorisés. Il partage sa vie sur Facebook avec son réseau d\'amis. Sur Amazon, il dévoile un tas d\'informations sur ses goûts, et ses envies d\'achat. Sur une tablette iPad ou un iPhone sont concentrés sa musique, ses contacts, son agenda. Où qu\'il aille sur le Web et quoi qu\'il y fasse, il laisse des traces et dévoile de précieuses informations sur son propre compte. C\'est d\'ailleurs en étudiant l\'ensemble de ces données que ces plateformes améliorent leurs services, créent les services de demain, répondent au plus près aux besoins des internautes et s\'enrichissent, en vendant de la publicité ciblée (Google, Facebook), ou des produits physiques et culturels (Amazon, Apple).Le citoyen travaille gratuitement pour les géants du NetMême si l\'internaute profite de services toujours plus performants, l\'échange est déséquilibré selon les auteurs du rapport. L\'internaute «travaille» donc gratuitement pour les géants du Net. «Les utilisateurs deviennent à travers ces données des auxiliaires de la production... L\'absence de contrepartie monétaire à l\'activité des utilisateurs explique en partie les gains de productivité spectaculaires dans cette économie». Conclusion, non seulement, les géants américains du numérique échappent à l\'impôt sur les sociétés, voire à la TVA, mais en plus, ils exploitent gratuitement les données des citoyens. Et le phénomène ne devrait qu\'empirer, le poids de l\'économie numérique ne cessant de croître.Taxer le «prédateur-payeur»Il est donc «urgent d\'interrompre la spirale mortifère», supplient les rapporteurs. D\'autant que les échanges devenant de plus en plus virtuels, il sera de plus en plus difficile de localiser les bénéfices. Pour les auteurs, il faut donc changer la façon d\'envisager la fiscalité, et taxer des éléments tangibles, mesurables et localisables. C\'est précisément le cas des «données», dont l\'on peut définir le point de départ, à savoir le clic. Il ne s\'agit pas de taxer toutes les entreprises qui ont des bases de données, ou font de la relation client, mais de s\'en prendre à tous ceux qui surexploitent les utilisateurs, en instituant sur le principe du «pollueur-payeur», celui de «prédateur-payeur». Seraient donc touchées les entreprises, qui exerceraient une forme de captation exclusive des données collectées.Fleur Pellerin reste prudenteVoilà pour la théorie. Mais la mise en pratique promet d\'être délicate: quelles seraient ces données, comment les valoriser, quelle taxe leur appliquer? C\'est sur ces questions que devront se pencher le CNN, les parlementaires et le gouvernement. Commentant le rapport, la ministre déléguée au Numérique Fleur Pellerin a quand même dit que «d\'autres pistes seraient étudiées, comme la taxe au clic, d\'anciennes propositions du CNN ou la taxe sur la bande passante». La prudence est de mise.
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