L'Europe accorde aux marques sélectives le droit de dicter leur loi sur le net

A un mois du lancement du iPad par Apple, le nouveau règlement européen relatif à la distribution sélective, que la Commission Européenne a édicté hier, tombe à pic. Comme toute autre marque sélective, Apple se voit accorder le droit de réserver ce produit-phare aux distributeurs qu'elle trie sur le volet en Europe. « Il y a fort à parier que Apple fera en sorte de ne pas la vendre sur les sites généralistes », regrette Gauthier Picquart, PDG de Rue du commerce.com. Comme d'habitude, oserait-on. Le lobby des marques sélectives et des grandes stars du luxe français comme LVMH, durant les deux ans qu'ont duré les travaux de la Commission, a donc payé. Elles ont réussi à protéger leur pré carré face aux Amazon, Ebay et autres Pixmania, alléchés par les 203 milliards d'euros que le e-commerce devrait peser en Europe occidentale en 2014 (selon Forrester). L'industrie du luxe confortée« L'industrie du luxe sort renforcée de cette décision qui confirme son droit de maîtriser la qualité de ses systèmes de distribution, physique et Internet », assure même un porte-parole de PPR. « Le cadre juridique [édicté par la Commission Européenne] permettra à l'industrie du luxe de continuer à répondre aux attentes des consommateurs, d'encourager le développement de l'économie digitale et de soutenir la croissance de notre industrie qui est fondée sur les valeurs de culture et d'innovation et représente plus de 800.000 emplois en Europe », s'est aussi félicité mardi, dans un communiqué, Pierre Godé, vice-président du groupe LVMH. De facto, le règlement leur assure le droit de réserver la vente en ligne de leurs produits aux seuls distributeurs qu'elles agréent et qui disposent d'un magasin physique. « Et de préserver ainsi leurs marges », persifle le dirigeant d'un site marchand.Pas d'ombre au réseau Les marques se retrouvent ainsi assurées de ne pas avoir à ferrailler avec des sites internet capables de vendre des produits moins cher que les magasins traditionnels. Et de faire trop d'ombre à leur réseau. Mais, nuance le réglement, un magasin agréé par la marque aura le droit d'exploiter sa vente en ligne. Difficile de croire qu'il pratiquera alors des tarifs plus intéressants qu'en boutique. "Les règles adoptées aujourd'hui garantiront que les consommateurs, où qu'ils soient dans l'Union européenne, pourront acheter des biens et services au prix le plus intéressant", estime pourtant le commissaire européen chargé de la Concurrence Joaquin Almunia.Prévisibilité "Ces nouvelles règles sont une avancée, car elles apportent davantage de prévisibilité juridique aux entreprises et garantissent un équilibre entre les différentes stratégies de distribution», ajoute Fabien Zivy, chef du service du Président de la Haute Autorité de la Concurrence à Paris. Quel sera l'impact réel de ce nouveau règlement européen ? Incitera-t-il les sites marchands à ouvrir des boutiques pour pouvoir décrocher le droit de vendre en ligne ? « Non, répond Gauthier Picquart. Quand bien même un site ouvrirait un magasin, rien ne lui garantirait de décrocher le droit de vendre une marque sélective ». Le e-commerce fort chagrin Ce règlement met-il le pied à l'étrier d'enseignes comme Carrefour ou Galeries Lafayette qui ont trainé à se lancer sur le net et disposent déjà de magasins ? « Elles n'ont pas attendu ce règlement pour monter en puissance », répond un expert. Il n'empêche. Les sites de e-commerce sont fort chagrins. Tous dénoncent une législation qui, abusivement, pourrait s'appliquer à des produits de mass-market. "Qui peut croire qu'une cafetière Nespresso ne peut être vendue en ligne, faute de conseils à la vente, alors qu'elle est disponible dans les rayons libre-service d'un hypermarché ?", s'interroge ainsi Guathier Picquart.
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