Les Français bientôt dans la rue ?

Pas d'amélioration avant 2014, a prévenu Hollande. D'ici là, austérité et rigueur vont se conjuguer à toutes les saisons de l'année 2013. Et cette année-là va être marquée par la croissance des mécontentements dans pratiquement toutes les couches de la population française: salariés du public et du privé, indépendants, retraités, sans compter les chômeurs qui voient encore s'éloigner une reprise possible de l'activité leur ôtant l'espoir d'une réinsertion professionnelle. Auxquels viendront s'ajouter les explosions de colère de ceux qui perdent leur emploi dans des fermetures. Faut-il alors s'attendre à voir les Français descendre massivement dans les rues, à des manifestations du type de celles qui ont mobilisé des dizaines de milliers d'Espagnols, de Grecs ou de Portugais? Non répondent en quatre points Jean-Pierre Basilien et Michèle Rescourio-Gilabert d'Entreprise & Personnel qui scrutent la conjoncture sociale.• Du fait de l'hétérogénéité des catégories sociales concernées, toute mobilisation, tout mot d'ordre fédérateur paraît problématique. Pouvoir d'achat en berne des classes moyennes et désespérance des chômeurs devant la situation du marché du travail peuvent, selon eux, difficilement se rejoindre sous une même bannière. Ce qui n'exclut pas des protestations ponctuelles menées efficacement par de petits groupes aux intérêts communs, tels que les «Pigeons». • Les forces sociales qui ont porté la gauche au pouvoir peuvent difficilement jouer le rôle d'opposants résolus et remettre en cause radicalement leur soutien. Certes les déçus ne manquent pas dans les bataillons qui ont voté Hollande, mais ils risquent plus de se borner à pointer des «insuffisances» que de participer à l'échec politique de la gauche. «Sans acteurs politiques et syndicaux à la manoeuvre, il n'y a pas de mobilisation d'importance», relève les deux experts. Ainsi le mouvement des Indignés n'a-t-il jamais eu de développement significatif en France dans un contexte politique pourtant beaucoup plus porteur de révoltes. • La division syndicale et le flottement de la CGT rendent peu plausibles la volonté et la capacité d'organiser des mobilisations importantes, autres que ponctuelles, telle la journée du 9 octobre, dont l'impact a été faible et sans suite. «Les syndicats ont contribué collectivement à l'échec de Nicolas Sarkozy et se sont réjouis de l'arrivée de François Hollande. Ils ne peuvent être que mal à l'aise à l'idée de le mettre en difficulté sur le plan social. Ce qui n'empêchera pas bien sûr rappels à l'ordre, alertes et protestations», estime Michèle Rescourio-Gilabert.• Enfin, la conscience qu'ont les Français de l'ampleur de la crise et l'absence d'alternatives crédibles, de débouchés politiques de toute mobilisation, et donc de leur inutilité doit être présente chez beaucoup de citoyens.Résultat: «la contestation est en quelque sorte bloquée, le climat social figé jusqu'à l'été 2013 au moins», parie Jean-Pierre Basilien. Il estime que le passage de l'inquiétude à la déception franche, en particulier dans l'électorat de gauche et les classes populaires, n'auront pas de conséquences visibles à court terme. Si l'atonie du climat social pourra donner l'impression d'une passivité du corps social, il n'est pas exclu que le populisme trouve cependant un regain d'expression. L'automne 2013 devrait se révéler à ce titre crucial: «si le scénario le plus noir se confirme, alors on se trouvera dans une situation socialement dangereuse», en concluent les deux experts. 
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