Les recours abusifs contre des permis de construire se multiplient

Ils sont la bête noire des promoteurs immobiliers, des entreprises de BTP et des collectivités locales. Des particuliers, souvent conseillés par des avocats qui font ainsi de l'argent facile, déposent des recours parfois illégitimes contre des projets immobiliers, retardant jusqu'à l'absurde la construction de logements ou d'équipements publics.Ainsi, à Marseille, la SCI Prado Cadenelle a été condamnée le 26 août à une amende de 3.000 euros pour requête abusive par le tribunal administratif pour avoir engagé un recours contre un permis délivré à une autre SCI pour la construction de deux immeubles de 130 logements, d'un local commercial et d'équipements publics.« Les recours contre la construction de logements sociaux, et plus encore de logements de standing, se multiplient. Or, nombre d'entre eux s'apparentent à des opérations de racket contre les promoteurs », dénonce Roland Blum, premier adjoint au maire de Marseille. « Les requérants demandent aux promoteurs de transiger et obtiennent parfois jusqu'à 150.000 euros ! Nous avons aussi enregistré des recours contre des crèches ! Or la ville gagne devant les tribunaux dans 95 % des cas. Les conséquences de ces recours sont lourdes : désorganisation des projets, arrêt des chantiers, frais inutiles ».De fait, certains recours sont litigieux. « À Saint-Gilles-Croix-de-Vie, un habitant qui avait acheté un appartement dans une première tranche de logements que nous avions construits a déposé un recours contre le reste du programme, alors qu'il était parfaitement au fait de l'ensemble du projet. Nous portons l'affaire en justice », raconte Bruno Corinti, président de Nexity logement. « Certains requérants n'hésitent pas à se faire domicilier dans des appartements de manière fictive pour déposer un recours », ajoute Marion Rochmann-Sacksick, une avocate spécialisée.« Réformer la procédure » Dans certains cas, les promoteurs sont obligés de payer pour lever des recours. « À Tours, nous avons dû verser 100.000 euros pour obtenir le retrait d'un recours contentieux déposé par deux sociétés et une personne physique voisine du projet », indique Bruno Corinti. « Le temps joue contre nous, reprend-il : il faut compter dix-huit mois pour qu'un recours contentieux soit traité par les tribunaux. Or les plans locaux d'urbanisme sont d'une telle complexité que nous ne sommes jamais sûrs qu'ils soient inattaquables. Et, lorsqu'un permis est attaqué, nous avons souvent déjà versé une indemnité d'immobilisation pour réserver le terrain et consenti des frais pour obtenir le permis. Or il est impossible de conclure des transactions devant notaire si des recours sont pendants. »Pour autant, tous les recours motivés par le désir d'une compensation financière ne sont pas absurdes et tous les recours abusifs ne se traduisent pas systématiquement par une demande d'argent, martèle Marion Rochmann-Sacksick. « Le contrôle de la légalité des actes administratifs fait partie de la démocratie, insiste l'avocate. Mais il serait judicieux de réformer la procédure pour permettre aux tribunaux de rejeter les recours dans des délais plus brefs, avec des procédures allégées. » Sophie Sanchez
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