La responsabilité pénale ne se délègue pas

Une entreprise ne peut pas facilement se désengager de sa responsabilité pénale. C'est encore plus vrai pour l'hygiène et la sécurité de ses salariés. Une société n'arrivera pas à se dédouaner de sa responsabilité pénale en ayant recours à une délégation de pouvoirs. Dans un arrêt rendu le 13 octobre dernier, la chambre criminelle de la Cour de cassation a en effet dégagé une position de principe : malgré une délégation de pouvoirs, l'entreprise employeur reste responsable de son salarié victime d'un accident du travail.Concrètement, les sociétés Urbaine de travaux, Jean Fayolle et Fils et Huguet ont décroché l'attribution du marché de l'adaptation des réseaux d'assainissement lors de travaux de construction d'une ligne de tramway. Un groupement d'entreprises avait alors été constitué entre ces trois sociétés. Dans le cadre de cette structure, elles avaient délégué leurs pouvoirs en matière de sécurité à un salarié de Jean Fayolle et Fils et au mandataire personne morale du groupement la société Urbaine de travaux auprès du maître d'ouvrage.En avril 2004, un accident du travail survient pour un salarié de la société Fayolle qui est hospitalisé. Il a eu une incapacité de travail supérieure à trois mois. Le salarié de Jean Fayolle et Fils mandaté par le groupement est alors poursuivi pour blessures involontaires et infractions à la réglementation portant sur la sécurité des travailleurs. De son côté, Urbaine de travaux en tant que mandataire personne morale du groupement est poursuivi pour blessures involontaires. UN message clairDans son arrêt du 19 janvier 2009, la 11e chambre de la cour d'appel de Paris a pris en compte les délégations de pouvoirs. Elle a considéré que le délégataire est le représentant de l'employeur du salarié victime. Par conséquent, c'est lui qui a commis les manquements incriminés. Avec ce raisonnement, la cour d'appel de Paris a condamné le salarié de Jean Fayolle et Fils, mandaté par le groupement, à une amende de 3.000 euros pour blessures involontaires et à trois amendes de 800 euros pour infractions à la réglementation générale sur l'hygiène et la sécurité au travail. De son côté, comme mandataire personne morale du groupement auprès du maître d'ouvrage, Urbaine de travaux s'est vue infliger une amende de 20.000 euros pour blessures involontaires.Les deux personnes condamnées se sont alors pourvues en cassation. Ils ne vont pas regretter de l'avoir fait. En effet, dans son arrêt du 13 octobre dernier, la Cour de cassation ne retient pas du tout le raisonnement juridique des juges du fond : « En cas d'accident du travail, les infractions en matière d'hygiène et de sécurité des travailleurs commises par le délégataire de pouvoirs, désigné par chacune des sociétés constituant un groupement d'entreprises à l'occasion de l'attribution d'un marché, engagent la responsabilité pénale de la seule personne morale, membre du groupement, qui est l'employeur de la victime. »Sûre de son interprétation en droit, la haute juridiction n'a même pas estimé nécessaire de renvoyer l'affaire devant une autre cour d'appel. Le message est clair ! Les entreprises doivent veiller au maximum à la sécurité de leurs salariés. Dans ce domaine, elles ne doivent pas chercher à faire des économies même en période de crise. Frédéric Hastingshygiène et sécurité
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