« Il faut un nouveau système monétaire international »

Un monde protégé des désordres monétaires, des déséquilibres économiques internationaux et des mouvements erratiques de capitaux. Qui serait contre ? Ce voeu a été exprimé par Nicolas Sarkozy dans le cadre de la présidence française du G20 en 2011. Considéré comme audacieux par certains pays dans un premier temps, cet objectif a commencé à susciter l'intérêt des dirigeants politiques avec les effets de la crise.Sur le constat, le consensus est large : « Depuis le début des années 1970, nous vivons dans un non-système international monétaire. On n'est plus dans le système de Bretton Woods, on n'a pas réfléchi à un nouveau système... », a plaidé Sarkozy. Le rapport réalisé par des personnalités telles que Paul Volcker, l'ex-président de la Fed, baptisé « Le système monétaire international pour le XXIe siècle » et remis vendredi au président français, propose d'offrir aux économies émergentes et en développement l'assurance qu'elles seront aidées par le FMI face aux mouvements erratiques des taux de change ou des capitaux. Elles n'auraient ainsi plus besoin d'accumuler des réserves de change dont l'énormité, notamment en Chine, contribue aux déséquilibres internationaux. Paris propose un rôle accru des DTS (droits de tirage spéciaux) afin de diluer un peu la prépondérance du dollar comme monnaie de ?réserve. Il souhaite enfin mieux coordonner les politiques économiques.Mais les divisions apparaissent sur les moyens à mettre en oeuvre. Pour le Trésor américain, « il importera que les monnaies de tous les grands pays du commerce international évoluent de manière flexible pour faciliter l'ajustement mondial ». Selon Washington, qui vise la devise chinoise, seul un système où les monnaies flotteraient plus librement permettrait de résorber les déséquilibres économiques, en mettant à contribution tant les pays à fort déficit courant, comme les États-Unis, que ceux à fort excédent courant, comme la Chine.Qu'il s'agisse des désordres économiques, de l'aide publique au développement ou des ?dérèglements climatiques, les grands défis du XXIe siècle sont à l'échelle mondiale. Or pour y répondre avec efficacité, les gouvernements - nationaux - ne disposent pas réellement des institutions internationales adéquates. Dans le cadre de sa présidence du G20, Paris veut relancer le débat sur le rôle de ces institutions et sur la place des pays émergents en leur sein. Une tâche digne des travaux d'Hercule.La Banque mondiale a déjà accompli une ?réforme dans ce sens. Celle du Fonds monétaire international (FMI) est bien engagée. Mais le processus est loin d'être achevé. Le rapport sur « le système monétaire international pour le XXIe siècle », remis à Nicolas Sarkozy vendredi et réalisé par des personnalités telles que Michel Camdessus ou Horst Köhler, tous deux ex-directeurs généraux du FMI, préconise de renforcer le rôle du FMI. Ce dernier devrait disposer de plus de prérogatives, tant en termes de supervision des économies des différents pays que d'intervention pour les secourir en cas de crise. Dans un tout autre domaine, la France souhaite accélérer la réflexion sur la « réforme intérimaire du Conseil de sécurité » de l'ONU, où l'élargissement du cercle des membres permanents aux émergents est enlisé.La question de la cohérenceAu-delà, la France soulève la question de la cohérence des actions des institutions internationales (Organisation mondiale du commerce, Organisation internationale du travail...). « Ne devrait-on pas, par exemple, adopter des règles de bonne conduite et de bonnes pratiques pour accorder l'aide publique (au développement) », se demande le président français. Il souhaite que le G20 devienne « le principal forum » mondial. Pour en assurer l'efficacité, Paris propose, avec d'autres, de doter le G20 d'un secrétariat « pour suivre en permanence la mise en oeuvre des décisions prises et instruire les dossiers ». En annonçant dès la fin de l'été 2010 qu'il entendait faire de la volatilité des prix des matières premières agricoles l'une des priorités de son G20, Nicolas Sarkozy a eu le nez creux. Les prix des denrées agricoles s'envolent, réveillant le spectre des émeutes de la faim qui ont endeuillé de nombreux pays pauvres durant l'hiver 2008.La France travaille donc dans différentes directions : améliorer les statistiques disponibles ; développer l'information sur le fonctionnement des marchés ; mieux encadrer les marchés à terme pour contenir la spéculation et enfin créer un groupe de sherpas dans le domaine agricole, capables de se concerter rapidement en cas de crise.« Étendre la régulation aux matières premières est possible et souhaitable, nous limiterons ainsi la spéculation », expliquait cet été Nicolas Sarkozy. Les matières premières sont devenues une classe d'actifs comme les actions ou les obligations. Pourtant, plusieurs études du Fonds monétaire international (FMI) ou de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont montré que la spéculation ne pouvait être tenue pour responsable de la hausse des prix de ces matières, même si elle peut en amplifier les mouvements.Durant l'hiver 2007-2008, ce ne sont pas les marchés qui ont fait flamber les prix des céréales - blé, riz... - mais la décision de plusieurs pays de limiter leurs exportations de peur de manquer pour leurs propres populations. La France souhaite donc créer un G20 agricole afin de favoriser la concertation des grands pays et d'éviter que des mesures unilatérales ?- comme l'interdiction d'exporter des céréales - ne provoquent de brusques flambées des prix. Bernard Bachelier, président de la Fondation Farm, se montre sceptique. « Difficile de croire qu'un chef d'État accepte de laisser ouvert le ?robinet des exportations si des récoltes insuffisantes menacent sa population. »
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