"Urssaf : arrêtons avec les clichés"

L\'approche retenue par Hervé Azoulay repose sur une idée totalement erronée, celle que les entrepreneurs seraient confrontés, dans la conduite de leurs projets économiques, à des institutions aveugles et peu attentives aux attentes de leurs usagers. Cette affirmation remet en cause l\'investissement des collaborateurs du réseau des Urssaf qui œuvrent chaque jour pour apporter un service public de qualité aux employeurs et travailleurs indépendants et qui ont comme préoccupation majeure d\'accorder les réponses adaptées aux cas particuliers auxquels ils sont confrontés.Cette approche écarte en outre le fait que les Urssaf sont gérées par les partenaires sociaux. Tant les représentants des entreprises que les représentants des salariés veillent à ce que les Urssaf exercent leur mission avec discernement et proportion et conformément à la mission qui leur est assignée. Des propos libres ne peuvent en aucun cas conduire à nier cette réalité et l\'investissement des femmes et des hommes qui permettent chaque jour le financement de notre système de protection sociale, élément essentiel de notre contrat social et de notre projet commun. Pour autant comme dans toute organisation, des imperfections, des dysfonctionnements ou des comportements non conformes demeurent et suscitent la plus grande attention tant des services que des membres des conseils d\'administration, pour améliorer l\'efficience des Urssaf.En 2011, près de 420 milliards d\'euros ont été recouvrés par les Urssaf et leur caisse nationale l\'ACOSS , soulignant ainsi les défis du financement public de la protection sociale. Ces ressources sont collectées au profit de près de 800 partenaires parmi lesquels les caisses du régime général de sécurité sociale (CAF, CPAM, CARSAT) et un grand nombre d\'acteurs tels que l\'Unédic ou les autorités organisatrices des transports.L\'enjeu est de garantir performance du recouvrement et qualité de service aux cotisants et ceci au moindre coût. Les frais de gestion et de contrôle s\'élèvent à 0,3 euros pour 100 euros recouvrés.Si la performance et l\'efficience du recouvrement par les Urssaf sont rarement contestées, certains affirment parfois comme M. Azoulay que ces organismes agissent constamment et de manière délibérée au détriment des entreprises. Quelques précisons apparaissent donc nécessaires afin de corriger ces lieux communs largement dépassés.L\'Urssaf n\'est pas le principal pourvoyeur des tribunaux de commerce Il convient de rappeler une idée simple : les Urssaf ne peuvent en aucun cas être considérées comme à l\'origine des défaillances d\'entreprises. Si le coût du travail donne lieu à de nombreux débats en France et en Europe, il ne peut être question d\'en rendre les Urssaf responsables des défaillances, même s\'il arrive que la procédure collective soit consécutive à une action en recouvrement de l\'URSSAF. Les Urssaf sont en contact tous les mois ou les trimestres avec les employeurs redevables. Elles constatent donc très rapidement et précocement les limites voire les échecs de projets d\'entreprises qui ne permettent pas de disposer des financements nécessaires à la bonne conduite d\'une activité. Ainsi, les actions en recouvrement engagées par les Urssaf ne sont à l\'origine que d\'un redressement judiciaire sur quatre et d\'une liquidation judiciaire sur six (13.000 assignations en 2011). Si les enjeux des montants correspondants aux obligations sociales et la régularité des versements exigent ainsi vigilance et discernement, le réseau des Urssaf est bien plus mobilisé par la détection, le suivi et l\'accompagnement des entreprises en difficulté que par leur liquidation. Ce sont près de 130.000 entreprises et travailleurs indépendants qui ont bénéficié d\'un dispositif de moratoire de paiement des cotisations en 2011. Ces délais de paiement sont d\'ailleurs respectés dans la très grande majorité des cas, preuve de l\'engagement des Urssaf et de leurs collaborateurs dans des démarches amiables de recouvrement. Ces dernières contribuent à la qualité des relations avec les entreprises. Elles sont aussi beaucoup plus efficaces en termes de performance de recouvrement. Les URSSAF ont donc un intérêt direct au développement d\'une politique amiable au plus près ou en anticipation des difficultés des entreprises. Ce n\'est qu\'en cas d\'échec de ces approches amiables de recouvrement qu\'elles sont amenées à lancer des procédures contentieuses plus lourdes et plus contraignantes. En 2011, environ 750.000 relances multimédias ont été réalisées et environ 350.000 remises de majorations de retard ont été accordées, démontrant qu\'il n\'est pas « impossible de discuter » avec les Urssaf. L\'objectif est donc de trouver les solutions appropriées pour la pérennisation des entreprises, et donc du financement de la protection sociale. Pourtant, l\'équilibre entre accompagnement responsable et soutien abusif reste fragile. L\'Urssaf se doit ainsi de rester vigilante et maintenir, par son action, la garantie d\'une saine concurrence entre les entreprises, certaines d\'entre elles pouvant jouer sur la déclaration et le paiement des cotisations et contributions sociales comme variables d\'ajustement en matière de trésorerie et de fixation de ses prix.Contrairement à un propos largement répandu, le contrôle n\'est pas une procédure instruite à chargeC\'est également dans ce cadre qu\'intervient la mission de contrôle des Urssaf qui répond à des finalités de solidarité nationale et de justice sociale. Le contrôle des usagers cotisants s\'inscrit dans une dimension de sécurisation du financement de la protection sociale, de préservation d\'une saine concurrence entre les entreprises et de rétablissement des droits des salariés et des employeurs.Le contrôle des déclarations sociales se traduit par une validation intégrale des pratiques, ou par un redressement ou par la restitution d\'un trop versé. C\'est ainsi qu\'en 2011, près de 200 M€ ont été reversés au entreprises, soit environ 15% des montants régularisés. Les inspecteurs du recouvrement s\'emploient donc à vérifier la bonne compréhension et la traduction dans les comptes de l\'entreprise des dispositifs législatifs et réglementaires en vigueur. Ils représentent donc pour l\'entreprise des interlocuteurs privilégiés qui clarifient et accompagnent la mise en œuvre des nouveaux textes. y compris lorsque l\'erreur a été faite par l\'entreprise à son propre détriment.Dans le même temps, il faut renforcer la lutte contre la fraude au prélèvement social !La recherche de l\'intention ou de la volonté manifeste prend alors toute son importance. De la simple erreur matérielle à la fraude caractérisée par travail dissimulé, les situations observées par les inspecteurs, trouvent des réponses différentes et appropriées en matière de traitement. La fraude détectée en termes de travail illégal, véritable fléau social et économique, a été chiffrée en 2011 à hauteur de 220 M€.Une politique active de sécurisation juridique des cotisantsLe contrôle a posteriori ne saurait pour autant constituer la seule action destinée à maintenir des principes d\'équité et de saine concurrence sur l\'ensemble du territoire. Des dispositifs de sécurisation du cotisant ont été mis en place afin de fiabiliser les déclarations produites par les entreprises et prévenir ainsi les risques de régularisation déjà évoqués à l\'occasion du contrôle. En 2011, les Urssaf ont ainsi fiabilisé les déclarations de plus de 36.000 entreprises en recourant à un dispositif de procédure amiable et d\'échange d\'informations avec les déclarants. Dans le même temps, plus de 20.000 diagnostics préventifs ont été réalisés au profit des entreprises (analyse d\'accords d\'épargne salariale, conseil pour les entreprises nouvellement créées ou à l\'occasion de la signature d\'accords d\'entreprise, ...).Une politique équilibrée portée par les partenaires sociaux représentés au sein des Conseils d\'administrationLes Urssaf sont des établissements privés, chargés d\'une mission de service public de recouvrement et administrés par un Conseil d\'Administration composé paritairement de représentants des employeurs et des travailleurs indépendants et de représentants des salariés. Là encore, les affirmations de M. Azoulay sont inexactes. Représentants des salariés et représentants des employeurs et des travailleurs indépendants ont un rôle actif dans la gestion et la définition des orientations des organismes de recouvrement qui sont contractualisées avec l\'Etat. Leur responsabilité s\'exerce notamment au travers des Commissions de recours amiable, composées de façon strictement paritaire, et chargées d\'examiner les recours formés par les cotisants. Les Urssaf assument donc leur mission de service public en toute transparence. Il est d\'ailleurs possible de trouver sur le site www.urssaf.fr des rapports d\'activité publics détaillés..Conscient de ses responsabilités et des enjeux, le réseau du recouvrement modernise ses structures, adapte ses procédures, notamment en développant une politique active de dématérialisation des déclarations sociales, d\'ouverture de services sur internet, de communication et d\'information réglementaire, et contribue résolument, tant sur initiative directe que dans le cadre des dispositifs partenariaux, à proposer des options aux entreprises en difficulté.A l\'heure où certains explorent « les nouveaux territoires de l\'intelligence économique », il est essentiel de ne pas créer d\'espaces de non droit où les principes de solidarité intergénérationnelle et interprofessionnelle seraient absents. Il apparait donc primordial dans le même temps de réhabiliter une forme de citoyenneté sociale, notamment au regard de l\'acceptation du prélèvement social, pour faire de ce maillage des réseaux porteur du contrat social et facteur d\'intégration que M. Azoulay appelle tant de ses vœux, un succès collectif fondé à juste titre sur la confiance dans les institutions, l\'écoute et la recherche de solutions appropriées.______Jean-Eudes Tesson et Pierre-Yves Chanu sont respectivement, président et vice-président de l\'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) Caisse nationale du réseau Urssaf 
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