Le financement des films menacé par les télévisions connectées à Internet

Et si un fabricant de téléviseurs signait un accord avec Time Warner, Paramount ou Disney (voir page 16) et proposait directement leurs films dans un service à la demande, accessible via la télécommande du poste, connecté directement à Internet ? Cette perspective, évoquée par Jean-Paul Salomé, réalisateur (« Le Caméléon ») et vice-président de la Société des auteurs, réalisateurs, producteurs (ARP), résume les préoccupations des cinéastes réunis aux 20e Rencontres cinématographiques de l'ARP à Dijon (21 au 23 octobre). « La publicité irait sur ces services au détriment des chaînes privées et leurs obligations d'investissement dans le cinéma (assises sur le chiffre d'affaires publicitaire) baisseraient. Les abonnés de Canal Plus, premier soutien du cinéma français, se tourneraient aussi vers ces services, au détriment de la chaîne cryptée », a prédit Jean-Paul Salomé. Début de réponse par décretLe décret imposant des obligations de contribution au financement des films aux services de médias audiovisuel à la demande (dits Smad), est un début de réponse. Après un avis défavorable de l'arbitre du secteur, le CSA, Conseil supérieur de l'Audiovisuel, très critiqué à Dijon, il sera transmis avec quelques retouches au Conseil d'État dans les prochains jours, a assuré le ministère de la Culture. Pour autant, le débat est loin d'être clos sur la pertinence d'un tel dispositif. Ligne Maginot pour les uns, alors que Google TV (et sa filiale Youtube), et autres Apple, non localisés en France, s'en exonéreront. Pour d'autres au contraire, comme Jacques Toubon, participant « historique » des Rencontres, ce décret s'inscrit dans la continuité du volontarisme français en matière culturelle, qui a fait reconnaître en Europe les quotas de diffusion d'oeuvres européennes à la télévision, et exclure la culture des négociations commerciales internationales. Au banc des accusés, Christophe Muller, directeur du développement des partenariats de Youtube pour l'Europe, s'est défendu. « Pour l'instant, nous ne diffusons que des formats vidéo courts, pas de films. Nous sommes un service d'hébergement pas un média audiovisuel à la demande. Nous signons des accords avec les sociétés d'auteurs (Sacem), nous fournissons des outils pour protéger les contenus hébergés du piratage. Nous reversons 30 % de nos recettes à nos partenaires. Nous voulons participer à la création avec nos moyens » a t-il assuré. Au Royaume-Uni, le cinéaste Ken Loach a mis gratuitement ses films sur Youtube, avec lequel il partage les recettes publicitaires. Des réponses insatisfaisantes pour les cinéastes : c'est en amont qu'il faut participer aux financements pour que les films puissent exister. Ils appellent à une réponse européenne.
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