Moore pourfend

cinémaMichael Moore est de retour et il est en pleine forme. Notre croisé des temps modernes, pourfendeur des injustices de la société américaine balade maintenant depuis vingt ans sa caméra exploratrice. Après nous avoir raconté les dégâts causés par General Motors dans sa ville d'origine, Flint dans le Michigan (« Roger et moi ») ; après nous avoir expliqué tout le mal qu'il pensait de George Bush Junior (« Fahrenheit 9/11 ») ; après avoir dénoncé le système de santé américain (« Sicko »), il s'attaque aujourd'hui, avec « Capitalism : a Love Story », au capitalisme américain et à ses dérives. Rien de moins. Et nous explique dans son long documentaire (2?h?06), l'extrême désillusion du peuple des États-Unis qui, pendant des décennies, a cru pouvoir profiter de la société de consommation. Le culte de la libre entreprise laissait entendre que chacun avait sa chance pour faire fortune.le rêve confisquéPour illustrer son propos, Moore a exhumé de vieilles images aux couleurs un peu passées qui nous montrent l'« american way of life », réelle ou supposée, telle qu'elle était imaginée dans les années 1950-1960. On sourit. Puis, toujours selon Moore, le rêve a été confisqué avec l'arrivée au pouvoir de Ronald Reagan et le triomphe des idées libérales : l'État, voilà alors l'ennemi. à en croire Moore, les financiers, avec l'appui des gouvernements successifs, ont pris le pouvoir. C'est Wall Street qui dicte sa loi.La survenue de la crise des subprimes est à cet égard du pain béni pour le réalisateur. À l'aide d'images qui feront pleurer dans les chaumières, il nous montre des pauvres citoyens endettés, obligés de vendre leur maison. Des salariés d'une usine de Chicago, sèchement licenciés sans préavis et sans indemnités. À l'opposé, en haut de l'échelle sociale, Moore filme des traders et autres banquiers en train d'amasser de colossales fortunes. Le tout sous le haut patronage de George Bush.Pour le documentariste, le comble a été atteint en septembre 2008 quand le secrétaire d'État au Trésor, Henry Paulson, a tenté de faire voter un plan de 700 millions de dollars, grâce auquel le Trésor américain rachèterait tous les actifs toxiques des banques. Selon lui, c'est là le dernier grand racket commis avant le départ de Bush.Certes, Moore a un savoir-faire indéniable pour expliquer les choses. Il sait utiliser des images fortes, c'est même sa marque de fabrique. Et l'on ne peut s'empêcher de rigoler quand il débarque devant les sièges des grandes banques américaines pour réclamer que leurs dirigeants soient jugés pour trahison ou vol. Il a également beau jeu de rappeler que Henry Paulson n'est autre que l'ancien patron de la banque Goldman Sachs et qu'il y a donc forcément conflit d'intérêts. Il n'en reste pas moins que Moore pèche par excès de mauvaise foi. Il oublie, par exemple, de préciser que le plan initial de Paulson a été amendé et que même? Barack Obama l'a finalement voté.lassitudeMichael Moore reste néanmoins efficace dans ses dénonciations, mais il s'en lasse manifestement lui-même. D'ailleurs, clin d'?il final et preuve qu'il a le sens de l'autodérision, dans la dernière scène, il dit en avoir marre de faire la même chose depuis vingt ans et réclame un successeur. n
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