Draka défend la fibre optique « made in France »

Plantée au milieu d'une zone industrielle, la tour de 30 mètres de haut de l'usine Draka de Douvrin (Pas-de-Calais) ne passe pas inaperçue. Aucune fumée ne s'échappe du sommet. Pourtant, à l'intérieur, des fours à induction chauffent à 2.000 degrés des tubes de verre ultrapur, issu du sable des Appalaches, pour en faire de la fibre optique, ces câbles de télécommunication qui transportent à très haut débit des quantités astronomiques de données. Alliage complexe de technologie et de chimie, le procédé de fabrication est protégé par une centaine de brevets. Placé à 25 mètres du sol, le tube s'étire sous son simple poids, comme un filet de miel qui tombe d'une cuillère. Arrivé en bas, la fibre aura été recouverte de deux couches de plastiques colorés, testée, puis mise en bobine. Un barreau de verre de 12 cm de diamètre et 1,20 m de hauteur permet ainsi de fabriquer en quelques minutes 1.000 km de fibre optique d'un diamètre de 125 microns.Fonctionnant 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, avec 430 personnes, l'unité de Douvrin est la plus grosse usine de ce type en Europe, parmi les cinq plus grandes du monde. « Numéro deux mondial, Draka assure 18 % de la production de fibre optique de la planète, soit 100.000 km de câbles par jour. La moitié est fabriquée ici, à Douvrin », explique Philippe Vanhille, directeur général de Draka France. Le reste est produit à Eindhoven aux Pays-Bas, le berceau de Draka, aux États-Unis, au Brésil et enfin en Chine où le groupe néerlandais détient 37 % d'une société commune avec NK Wuhan, le numéro un chinois.Menacé par l'explosion de la bulle des télécoms dans les années 2000 - ce qui poussa Alcatel à vendre en 2004 son activité, dont l'usine de Douvrin créée en 1990, à Draka -, le marché mondial de la fibre optique connaît aujourd'hui une deuxième jeunesse.  À elle seule, la Chine absorbe la moitié des 180 millions de km produits chaque année dans le monde. Mais la France, avec ses projets de réseau national à très haut débit, soutient aussi le marché et l'activité de Douvrin. « France Télécome;lécom et Free se fournissent ici en fibre optique », indique Philippe Vanhille. Capacités chinoisesMais cet ex-Alcatel, qui travaille sur la fibre et les câbles depuis vingt ans, est inquiet : « La Chine ne peut pas encore répondre à tous ses besoins et se fournit encore ici. Mais les industriels chinois apprennent vite et mettent en place d'importantes capacités de production. Nous savons qu'ils viendront bientôt frapper à la porte de nos clients. On se prépare à une bataille féroce. »Une menace qui inquiète toute la filière des télécoms et de l'électronique. Car si la crise des années 2000 a anéanti une grande partie des industriels français des télécoms, l'arrivée de la Chine risque d'être fatale aux survivants. Pour Pierre Gattaz, le président de la Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (Fiec), il serait « extraordinaire qu'à l'heure où la France engage des milliards d'euros pour déployer le très haut débit en France, les équipements viennent de l'extérieur ». L'objectif est donc d'arriver à profiter de ce plan pour recréer, autour de Draka, mais aussi d'Acome, dans la Manche, un écosystème français de la fibre optique.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.