Enquête sur les catholiques de France

Quand, le 12 septembre 2008, quelque 650 personnalités françaises ont accueilli et applaudi Benoît XVI au Collège des Bernardins, il ne manquait qu'une grande figure, celle du cardinal Jean-Marie Lustiger, initiateur de la restauration des Bernardins, emporté par la maladie en 2007. Et peu, parmi les invités, savaient que le succès des Bernardins tenait beaucoup à une mobilisation extraordinaire d'une poignée de grands patrons français, séduits par le projet du cardinal défunt. C'est ce que révèle notamment, dans une enquête passionnante et fouillée, Marc Baudriller, journaliste à « Challenges ». Pour lui, les Bernardins, « c'est le triomphe des réseaux cathos, le chef-d'oeuvre de quelques baptisés. La démonstration de ce qu'ils peuvent mettre en place dans une société où ils ne pèsent plus grand-chose ». Le « rêve » du cardinal Lustiger - rouvrir le Collège des Bernardins, dans un piteux état - naît en septembre 1998. Le prélat se confie à un cadre dirigeant d'Axa, Bertrand de Feydeau, « amoureux de vieilles pierres » et spécialiste de l'immobilier. Encouragé par Claude Bébéar, Feydeau quitte Axa pour se mettre au service du cardinal et prend le projet à bras-le-corps. Il s'agit de convaincre les Monuments historiques, la Ville de Paris, la région Île-de-France et l'État d'autoriser l'Église à reprendre les Bernardins. Et surtout de trouver des financements (plus de 50 millions d'euros) pour mener à bien le projet. C'est là que les « réseaux cathos » vont faire merveille. Feydeau mobilise des spécialistes du mécénat et du « fundraising », notamment des anciens d'Axa... Henri de Castries (toujours Axa !) accepte de parrainer le projet, rejoint par le banquier Michel Pébereau, Patrick de Carolis (France Télévisions), Anne-Marie Idrac (secrétaire d'État au Commerce extérieur), Anne Lauvergeon (Areva), Bertrand Collomb (Lafarge), Michel Camdessus (ancien patron de la Banque de France et du FMI), Maurice Lévy (Publicis), Geoffroy Roux de Bézieux (The Phone House), Patricia Barbizet (groupe PPR), Jean-Pierre Jouyet (actuel président de l'AMF) ou l'homme d'affaires tunisien Tarak Ben Ammar... La liste serait trop longue de ces responsables économiques, catholiques ou non, pratiquants ou non, enthousiasmés par le projet et devenus parrains ou donateurs...Marc Baudriller revient aussi sur les multiples ramifications entre patrons, cadres et syndicats chrétiens (essentiellement la CFTC), les associations nouvelles où ils se croisent, les pèlerinages où ils se retrouvent, y compris le réseau discret de l'Opus Dei en France, dont la figure de proue, dans le domaine économique, reste Jacques de Chateauvieux, PDG du groupe Bourbon. Un récit passionnant et très documenté.Alain Baro
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