L'effet domino de la dette des entreprises

L\'effet combiné de la détérioration de l\'environnement économique, de l\'insuffisance de liquidité, et de la dégradation des ratios et autres tests prudentiels fait peser sur les entreprises un risque de défaillance et fragilise les intérêts des financiers. Ce constat se vérifie notamment dans les entreprises sous LBO (leverage buy out) où l\'endettement des sociétés holding a été structuré en fonction des performances de leurs filiales opérationnelles et de la capacité de celles-ci à générer du profit qui, une fois distribué sous forme de dividendes, est mis essentiellement au service de la dette d\'acquisition. Ainsi, une baisse de performance de la filiale entraîne inévitablement des difficultés pour la holding à respecter les engagements liés à son endettement.C\'est pourquoi plusieurs entreprises cédées en 2004-2006 dans le cadre de LBO ont fait l\'objet d\'une première restructuration en 2008-2009 en conséquence des ruptures de ratios constatées consécutivement au ralentissement économique. Dans bien des cas, les discussions avec les prêteurs avaient abouti à un rééchelonnement de la dette existante ou à sa transformation en dette dite « bullet » (remboursable in fine). Cette première vague de restructuration consistant à « remodéliser » les calendriers de remboursement avait parié sur un retour à la croissance à court terme.Or, quatre ans plus tard, les premières tranches de dette senior arrivent à échéance (conformément aux calendriers de remboursement alors renégociés) tandis que les sociétés tête de groupes sont dans l\'incapacité de les honorer en raison d\'une crise économique et financière persistante. Dans ce contexte, les acteurs du marché font face à une deuxième vague de restructuration. Mais cette deuxième vague intervient dans un environnement bien plus tendu puisque c\'est le montant de la dette et non plus seulement son échéancier qui est désormais remis en cause. Le dernier indicateur de l\'Association pour le retournement d\'entreprises (ARE) confirme cet état des lieux en révélant « un changement de profil brutal [qui] apparaît déjà dans les dossiers ouverts sur le dernier trimestre » avec une dette moyenne de l\'ordre de 174 millions d\'euros, contre 12 millions au trimestre précédent.À cet égard, les professionnels de la restructuration ne peuvent que constater que le sauvetage des entreprises devra impérativement passer par un redimensionnement de la dette, ce qui cristallisera très vraisemblablement les discussions entre dirigeants, actionnaires et financiers dans la mesure où :essentiellement parce qu\'elles cassaient leurs ratios (breach of covenants), sont aujourd\'hui en défaut parce qu\'elles ne peuvent faire face à l\'échéance du principal voire dans certains cas au remboursement des intérêts ; nouveau tour de table dès lors que la valeur du sous-jacent est inférieure au montant de la dette résiduelle ;et conditionnent leur décision à l\'ampleur de l\'abandon que les banques senior sont prêtes à consentir puisque leur dette et leurs sûretés sont subordonnées ; renégocier des calendriers de remboursement il y a quatre ans pourraient avoir à déclasser leurs créances dans leur propre bilan en conséquence des défauts de paiement constatés (intérêts et/ou principal) et renoncer en outre à une partie de l\'encours.C\'est pourquoi, face aux intérêts en jeu de plus en plus difficiles à conjuguer, les banques ne sont unanimes ni sur l\'importance de l\'effort qui leur est demandé ni sur la répartition entre elles de cet effort. Mais des divergences plus fondamentales pourront encore être exprimées dans les prochains mois, une fois que les bilans 2012 sonneront l\'heure de la restructuration inévitable pour un certain nombre d\'entreprises françaises. Selon les rapports de force existants, certains établissements financiers n\'excluront pas l\'alternative d\'une prise de contrôle de leur débiteur par le mécanisme des sûretés exercées (security package) tandis que d\'autres préféreront céder leurs créances à des fonds dédiés au rachat de dette décotée.
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