Vive la crise qui favorise une consommation nouvelle !

Par Raphaël Palti, président fondateur d'Altavia.

Nous sommes aujourd'hui incontestablement confrontés à des comportements de déconsommation. Le phénomène est d'ampleur et touche la quasi totalité des secteurs de notre économie. L'inquiétude qu'il génère est justifiée, car c'est tout notre système économique et social qui est en jeu. Cette situation, si elle perdure, est grave. Car la consommation structure nos sociétés démocratiques et les exclus de la consommation deviennent rapidement des exclus de la société. Tous les acteurs économiques ont le devoir d'agir pour soutenir la consommation et pour ce faire, il faut être conscient que les raisons de la déconsommation d'aujourd'hui sont autant structurelles que conjoncturelles.

Dans notre Observatoire Altavia/Opinion Way, nous avons bien constaté cette tendance à la déconsommation, mais nous voyons se confirmer d'autres choses aussi, qui ne sont qu'en apparence contradictoires et qui dessinent le futur d'une consommation à réinventer : d'un côté l'envie de consommer et de se faire plaisir est toujours là, mais d'un autre côté s'exprime le malaise de gens qui ne veulent plus sur consommer. Le besoin de sens, les réflexions que chacun porte sur la situation actuelle et l'avenir de la planète, certains excès dans l'hyper segmentation des marchés, provoquent des réactions qui peuvent être très vives contre "l'hyper" consommation.

Les gens nous disent devoir faire de plus en plus attention, choisir davantage les marques de distribution et le hard discount, parce qu'ils voient leur pouvoir d'achat baisser dans leurs achats quotidiens et contraints. Ils traquent les bonnes affaires, multiplient leurs choix de magasins pour trouver le meilleur prix, jouent de toutes les ficelles des programmes de fidélité. C'est de cette manière que peuvent encore se préserver des achats plaisir. Il faut aussi y voir la capacité des clients à comprendre et à décoder intelligemment les offres qui leur sont faites.

Ce phénomène s'étend et s'accompagne de signaux faibles, mais trop récurrents pour qu'on les ignore : les échanges entre consommateurs, le troc, les achats d'occasion, le fait soi même, y compris dans l'alimentaire (faire son pain, cultiver ses légumes). Ces comportements traduisent aussi une certaine défiance envers les industriels à qui on ne pardonne pas de tricher sur la qualité ou la quantité.

Derrière tout cela, il y a la nouvelle réalité d'un client consom'acteur de plus en plus intelligent (parfois même, et pour un temps, plus intelligent que ses commerçants), averti et conscient de son pouvoir. Cette réalité n'est pas née avec la crise, mais la crise ne fera que l'amplifier car le client aura tendance encore plus à privilégier son intérêt. L'évolution s'est accélérée avec le développement des nouvelles technologies qui ont conféré au client les moyens de son pouvoir : le pouvoir de comparer à grande échelle, d'échanger avec ses pairs, de mieux piloter sa consommation.

Aujourd'hui, 57% des Français déclarent que sans eux les marques ne pourraient pas survivre ; ils sont 44% à penser la même chose à l'égard des enseignes. Ils se disent prêts pour 77% d'entre eux, à boycotter une marque ou une enseigne. Ces chiffres* sont significatifs de la prise de conscience qui s'opère et du potentiel que représente le pouvoir du consom'acteur.

Dès lors, comment soutenir la consommation sans provoquer ni éc?urement, ni méfiance, ni frustration, ni ressentiment, est l'un des axes majeurs des réflexions qu'il faut mener aujourd'hui.

Il faut certainement réinventer les offres, et pour ce qui est de notre métier, réinventer la communication commerciale. On ne pourra plus faire comme avant. Les commerçants doivent inventer de nouveaux formats, de nouvelles formes de commerce, une nouvelle nature de relations avec leurs clients. Sélectionner ce qui a du sens, aujourd'hui et durablement, savoir aller vers les clients, entendre leurs besoins de proximité, de facilité, de clarté, de transparence... sont les seules voies de reconquête. Le client a besoin d'être rassuré, de retrouver la confiance. Le tout marketing qui s'auto-satisfait de fausses innovations est bien fini !

Le client n'est plus dupe : avec la crise économique, chacun va devoir repenser sa consommation, aller à l'essentiel, revenir à la qualité et la simplicité. Ce sont de formidables opportunités qui se dégagent et c'est à l'avènement d'une nouvelle consommation que nous assistons : plus saine, plus adulte, plus intelligente, davantage fondée sur le bon sens.

Il est temps enfin de remettre du plaisir dans la consommation, de remettre de l'humanité dans les relations, de surprendre, d'égayer... Ceux qui agiront vite traverseront ces temps mouvementés mais qui s'avèreront salutaires. Les stratégies "pull" prendront le pas sur les stratégies "push", la satisfaction du client sera le leit motiv et la consommation sera à la fois plus juste et plus gaie.


* Source Observatoire Altavia/OpinionWay du consom'acteur 2008 . Résultats sur www.altavia-group.com

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Le monde de consommation reste le même. Seul le porte monnaie fixe les limites, et dès qu il sera de nouveau rempli ( par encore demain cela dit ), les gens consommeront de nouveau n' importe comment.

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