Le plan de relance annoncé par le président Sarkozy apparaît comme une chance historique gâchée. Tout d'abord, comme de nombreux commentaires l'ont souligné, il ne s'agit pas d'un plan de 26 milliards d'euros nouveaux, mais de 4 milliards, les autres dépenses étant déjà programmées ou dues en toute hypothèse. Surtout, ce plan reste marqué par une conception très court-termiste et sans vision d'ensemble. Il contraste avec le plan annoncé par le futur président Obama qui est porteur d'un projet global : la mise sur orbite de l'économie post-pétrolière.
Le plan Sarkozy ne s'attaque pas au fond du problème. La prime de 1.000 euros à la casse en est une parfaite illustration. En effet, cette prime payée pour l'acquisition d'une voiture émettant moins de 160 g de CO2/km va sans doute permettre de vider les stocks, mais ne va en rien permettre la reconversion écologique de ce secteur industriel. Dès lors, comme l'a déjà annoncé Carlos Ghosn, cette prime permettra de moins licencier mais ne sauvera pas les emplois d'aujourd'hui et encore moins ceux de demain.
Or c'est de cela dont il s'agit. Traiter le volet social de la crise économique tout en fléchant la relance vers un "new deal" vert. Le doute que tel soit l'orientation choisie est d'autant plus permis que, si la croissance verte a fait couler beaucoup d'encre et a donné lieu à de belles envolées lyriques, les faits ont la vie dure, et la réalité des décisions concrètes est sans rapport avec cet objectif pourtant indispensable. Une impression de confusion et de contradiction est indéniable. Où est la logique entre la relance autoroutière et l'encouragement à l'achat de véhicules sans bonus, alors que les Français réduisent l'usage de la voiture et y sont incités sur un plan général ? L'OIT voit dans le développement des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique une source d'investissement et d'emplois verts. Mais rien n'est prévu dans le plan de relance à ce sujet, et les sénateurs suppriment l'obligation de sobriété énergétique pour bénéficier des prêts à taux zéro.
Plus grave encore, la violence des attaques lancées par le lobby nucléaire contre le développement de l'éolien, accusé de tous les maux, aboutit à créer en France la législation la plus ubuesque du monde pour installer des éoliennes. Sans doute, l'éolien présente des inconvénients, mais toutes les énergies en ont, à commencer par le nucléaire qui est antinomique avec un développement soutenable pour la double raison qu'il utilise des matières premières non renouvelables et qu'il lègue aux générations futures des déchets d'une dangerosité sans comparaison possible. Mais comment prétendre encourager l'éolien, quand en réalité on multiplie les obstacles à son installation ?
Quant au solaire apparemment favorisé, il ne l'est que dans la mesure où il n'apparaît pas menaçant pour le nucléaire. Car la maturité de la technologie est moindre pour produire de grande quantité d'énergie, ce qui n'est pas le cas de l'éolien. En revanche, pour ce qui est mâture, comme le photovoltaïque, le changement du prix de rachat de l'électricité pour le tertiaire anéantit, comme par hasard, la rentabilité des projets en cours.
Enfin, la volonté de la majorité de favoriser le chauffage électrique d'origine nucléaire dans les habitations s'inscrit aussi en faux avec l'essor des bâtiments à basse consommation, a fortiori à énergie passive ou positive. En définitive, tout se passe comme si le choix avait été fait non pas de pousser l'industrie verte, mais au contraire de continuer à soutenir les industries à bout de souffle ou condamnées du XXe siècle, au lieu d'encourager leur reconversion et de soutenir les nouvelles technologies.
Or le plan de relance, bien loin de tracer une voie nouvelle, ne fait qu'ajouter de la confusion en distillant l'effort. Cette orientation condamne à moyen terme notre population à un chômage croissant même après la reprise mondiale qui viendra, parce que nous n'aurons pas une offre correspondant à la demande mondiale. Faute d'avoir compris qu'il fallait investir dans la reconversion écologique, le plan de relance et la politique effectivement suivie ne produiront que des effets modestes et de très court terme. On aurait attendu des investissements massifs dans les nouveaux modes de transport, en particulier les centrales de mobilité et l'autopartage, l'habitat économe et l'efficacité énergétique à tous les niveaux, permettant à une économie nouvelle de se développer.
Une telle politique aurait nécessité un fléchage des crédits sur les écotechnologies, une politique de formation des personnels pour s'adapter aux nouveaux métiers, un effort massif en termes de recherche-développement et une aide à la reconversion. Le Grenelle de l'environnement avait là une chance de se concrétiser. Il l'a perdue au moment même où la réduction de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) rend très aléatoire le financement des mesures annoncées.
En faisant un choix contraire qui satisfait les grands lobbys en place, nous pérennisons un rapport de forces au sein du monde économique qui rend quasi impossible la croissance des entreprises représentant les nouveaux secteurs, a fortiori leur capacité à peser en faveur d'une accélération du changement.
En effet, tant que le nombre de personnes employées dans les secteurs anciens sera infiniment supérieur à celui des personnes employées dans les nouvelles technologies de l'environnement, les choix se feront en faveur du passé et non du futur. Le serpent se mord la queue ! Au lieu d'utiliser la crise actuelle pour changer de braquet, nous maintenons le cap ancien. Nous étions déjà en grande difficulté du fait de l'inadaptation de notre offre. Nous perdons une chance historique d'utiliser l'opportunité de la relance pour doper l'industrie française du XXIème siècle.
Mais si elle devait nourrir quelque nostalgie pour les USA, qu'elle n'hésite pas. Outre que son absence risquerait de passer inaperçue, elle découvrirait peut-être que le pays d'Obama qui n'y est pour rien, n'est pas un chantre de vertu, pas plus sur le plan de l'écologie (pollution des usines, des véhicules, dépenses d'énergie en général), que sur le reste : jusqu'à preuve du contraire, les scandales financiers, y compris le tout récent, nous viennent bien de la-bas, non ? Les transformations qu'elle appelle de ses voeux et elle n'est pas la seule, demanderont de bien longues années. En attendant, elle ferait quoi de tous ceux qui perdront leur emploi chez nous ?
Confrontée à des installations d'éoliennes sans concertation par les élus, elle réagirait différemment.
Je viens de lire 2 articles édité par Mme Corine Lepage, l'un sur la relance l'autre sur la crise de la jeunesse.
Je suis en totale acord avec ses analyses.
J'irais même plus loin. Lors de la crise de 1974 soit plus de trente ans en arrière le sloggan était " La France n'a pas de pétrole mais elle a des idées". Plus de trente anées se sont écoulées, la France n'a toujours pas de pétrole et l'on ne voit pas beaucoup leffet des idées de l'époque. Les voiture marchent toujours au pétrole, on se chauffe au pétrole ou au nucléaire comme en 1974.
Notre président réutilise des solutions du passé "prime à la casse pour faire vendre des voitures". N'aurait-il pas été plus judicieux d'investir pour sortir de notre dépendance au pétrole et au nucléaire.
Mais on ne peut peut-être pas être président de la république et être intelligent. On ne peut pas tout avoir !!!
vos commentaires ne seraient pas un peu tintés de misogynie ? Vous conviendrez que le plan Sarkozy, avec ses 26 milliards d'euros, est bien court. Ce n'est pas ça qui relancera la machine !
Je suis heureuse de lire un article extremement clairvoyant de Corinne Lepage.
Effectivement, la crise financiere est un moment clé pour lancer de grands projets d'investissements dans l'économie post petrole : eolien, solaire, renouveau nucléaire, automobiles hybrides et electriques, reduction de la consommation d'energie, agriculture durable, etc.
Le plan d'investissement massif de 26 milliards a accouché d'une souris. Principalement destiné aux petits copains patrons soutiens du President, dont MM. Ghosn ou Cirelli.
Ce plan est une mascarade politique et absolument pas le "green deal" qui permettrait a la France de demarrer sur de nouvelles bases economiques.
Je vous ai connue première adjointe au Maire de Cabourg, vous aviez à l?époque les dents moins longues que maintenant et je regrette beaucoup que vous soyez accoquinée avec tous ces personnages du SER avides de gains faciles à gagner sur le dos du consommateur à qui l?on raconte à qui mieux mieux que les ENR et en particulier l?éolien sont l?avenir de la France.
Vous avez été ministre de l?Environnement pas longtemps je vous l?accorde en tout cas pas assez pour en faire un sacerdoce puisque vous défendez par l?intermédiaire de Cap21 tous les gros bonnets qui pour leur enrichissement personnel et le vôtre par la même occasion s?acharnent à détruire la France et la vie des Français. Comme beaucoup, vos convictions d?antan sur la protection de l?environnement tombent devant les dividendes. Je trouve votre revirement lamentable, et espère que devant les dégâts environnementaux que vous encouragez votre conscience s?en trouvera profondément perturbée.
Il faudra en sortir, messieurs les présidents (n'oublions pas Giscard qui est contre le solaire le 12 novembre au matin et pour (parce que contre l'éolien) le 12 novembre au soir.
Certains commentaires tombent dans la bassesse de l'ignominie, de la misogynie et les attaques personnelles, cela montre le niveau des opposants farouches à l'éolien.
Moi, je suis favorable à l'éolien, résolument et j'attendais aussi un Plan de relance d'un autre niveau.
Toutefois Madame Lepage ne nous dit rien sur la pire des pollutions : le bruit.
Probablement que goûter aux premiers soleil du printemps à proximité d'une éolienne, sous un couloir d'aviation, en bord d'autoroute ou de ligne TGV etc. ferait mieux prendre conscience des réalités et des effets quotidiens de la destruction environnementale et des conditions de vie. Peut-être que les orientations économiques et la recherche gagneraient en pertinence et en efficacité... Peut-être que l'on déciderait de respecter enfin le droit de vivre dans un environnement sain et les droits de l'Homme, que les aéroports et les éoliennes seraient sur la mer, les TGV et les voitures rendus enfin silencieux et, cela va de pair, propres... C'est cela le développement économique centré sur l'Etre humain (humaniste), réellement durable, porteur d'espoirs, de motivations, de fierté, de joie de vivre et d'emplois...
Cordialement,
- probablement qu'il subsiste des marges budgétaires pour aller plus loin. Espérons si tel est le cas qu'elles soient investies dans une perspective de développement durable
- l'introduction de l'économie en seconde semble plus que nécessaire pour élever le niveau de compréhension du citoyen (par exemple faire la différence entre un investissement et une dette...)
Corinne LEPAGE propose d'écouter et voir de façon globale les enjeux environnementaux, sociaux, et économiques. A partir de là, mettre en cohérence ce qui a été acté enfin par le Grenelle de l'Environnement ; mais identifié comme GRAVE et URGENT depuis theodore MONOD, Jean DORSTE il y a 40 ans, par le GIEC depuis 16 ans... Voulez vous attendre encore combien de temps avant d'agir ?...
Alors effectivement, elle défend l'éolien comme l'agriculture bio, les circuits courts et combat les trusts multinationales. Ne leur déplaisent!...
Son choix du MoDem ressemble plus au parcour du combattant, qu'au fauteuil doré (certes occupé par trop d'anciens du "canal historique" UDF) ; mais qui anime le vivier de jeunes militants gavés de ces oppositions idéologiques Gauche / Droite stériles !
En effet, je ne fais pas partie des gens qui regrettent leur choix.
Faire de la relance sur un modèle de société dépassé. Cela me dépasse.
Pour carlottarel !
Sloggan de 1974 : "La France n'a pas de pétrole mais elle a des idées". Où sont les idées innovantes en 2008
Et comme on est décidément les plus intelligents, alors on ne change surtout pas d'avis. Bien que sachant qu'historiquement il est impossible de faire carrière en politique dans ce pays quand on critique la stratégie nucléaire du pays (seul cas dans les pays à élections libres, ce qui tend à montrer qu'un pouvoir occulte et sans contrôle domine quelque part), Corinne Lepage a le courage de dénoncer la persévérance dans l'erreur de la politique électronucléaire du pays. Tout indique qu'elle a raison. On s'en persuade facilement dès lors que l'on se donne la peine d'étudier le dossier au lieu de se contenter de colporter la propagande officielle.