Quand la France rate les trains de la liberté

Par Valérie Segond, journaliste à La Tribune.
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"La France n'a pas raté tous les trains de la liberté", affirmait après la chute de Ben Ali, Patrick Devedjian. Est-ce bien sûr ? Elle n'avait déjà pas vu venir la chute du mur de Berlin en 1989, ni le coup d'Etat contre Gorbatchev en 1991. Nos chefs d'Etat sont-ils si mal renseignés ? Sont-ils prisonniers d'une doctrine qui, au nom de la stabilité et du rempart contre la montée d'autres périls, comme l'islamisme radical aujourd'hui, s'accommode des dictatures même lorsqu'elles ont basculé dans la kleptocratie et creusent les inégalités jusqu'à l'insupportable ? Ou craignent-ils seulement de prendre position prématurément, avant que le vent n'ait réellement tourné, tant le changement est lourd à gérer pour les partenaires historiques ? Il semble pourtant que nos diplomates connaissaient parfaitement la prédation des Trabelsi, l'état d'esprit de l'armée de terre à leur égard, et l'exaspération de la population.

La vraie question, dit l'ancien ambassadeur au Sénégal, Jean-Christophe Rufin, est plutôt de savoir ce que Paris fait des renseignements qu'il reçoit de ses ambassadeurs, de la DGSE, des directions régionales du Quai d'Orsay comme du ministère de la Défense. La question se pose tant les grands partis politiques français, toutes tendances confondues, entretiennent avec les Etats du Maghreb comme avec certains Etats africains, des relations financières si étroites qu'elles les lient durablement avec les dictateurs.

Ensuite parce que ces États financent des circuits parallèles de désinformation, par le truchement d'agences de communication, d'avocats et d'anciens ténors politiques, qui vont jusqu'au Quai d'Orsay et à l'Elysée pour discréditer et déstabiliser les observateurs trop regardants. Deux leviers bien peu transparents qui ne grandissent pas l'image de la France. Vivement les dépêches de nos ambassadeurs sur WikiLeaks !

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