Contrôle des investissements étrangers : Paris a entendu les industriels et reste pragmatique

OPINION. Cette tribune commente la portée limitée du dernier renforcement de l’arsenal législatif français, datant d’il y a quelques jours, afin de protéger les entreprises françaises des investissements étrangers.Par Simonetta Giordano, Associée, Anna Velitchkova, Of Counsel, et Antoine Melchior, Collaborateur, chez Simmons & Simmons à Paris
Cette réforme est toutefois limitée à trois égards. Elle n'est applicable que jusqu'au 31 décembre 2020, ne concerne que les investisseurs d'État tiers à l'Union et à l'Espace économique européen, et est circonscrite aux seules sociétés cotées françaises. (Simonetta Giordano, Anna Velitchkova et Antoine Melchior)
"Cette réforme est toutefois limitée à trois égards. Elle n'est applicable que jusqu'au 31 décembre 2020, ne concerne que les investisseurs d'État tiers à l'Union et à l'Espace économique européen, et est circonscrite aux seules sociétés cotées françaises". (Simonetta Giordano, Anna Velitchkova et Antoine Melchior) (Crédits : FTI Consulting)

Comme annoncé en avril 2020 en plein cœur de la crise du COVID-19 en France, et alors même que les États européens durcissent leur arsenal législatif, un décret visant à protéger les entreprises françaises cotées sur un marché réglementé vient de paraître. La crise sanitaire du Covid-19 ayant affecté, parfois considérablement, les entreprises françaises, le ministre de l'Économie a décidé d'étendre le champ du contrôle des investissements étrangers à toute acquisition par un investisseur non-européen de plus de 10% des droits de vote d'une entreprise française cotée sur un marché réglementé.

C'est une évolution de plus du champ d'application d'un régime qui ne cesse de s'étoffer. La France s'est en effet dotée relativement tôt d'un mécanisme de filtrage visant à protéger les intérêts du pays en matière d'autorité publique, d'ordre public et de sécurité publique. Depuis ces prémisses en 1966, le champ d'application du contrôle des investissements étrangers s'est considérablement renforcé, la liste des secteurs sensibles a été étendue et les seuils abaissés.

Une liste élargie

Dans le cadre de la procédure d'autorisation préalable du ministre chargé de l'Économie telle qu'issue du décret n°2019-1590 du 31 décembre 2019, le ministre dispose d'un délai de trente jours ouvrés pour accepter, éventuellement sous conditions, ou refuser l'investissement notifié. Si nécessaire, il peut disposer de manière discrétionnaire d'un délai de quarante-cinq jours ouvrés supplémentaires. Toute absence de réponse du ministre vaut, dans le cadre de cette procédure, refus de l'investissement (ce qui est une nouveauté issue de ce décret).

En réaction à la crise sanitaire de la Covid-19, le ministre chargé de l'Économie a modifié à deux reprises le mécanisme de filtrage des investissements étrangers. D'abord, par un arrêté du 27 avril 2020 aux termes duquel il élargit la liste des technologies critiques au secteur des biotechnologies. Enfin, par le décret précité, lequel est assorti d'un arrêté publié en date du 23 juillet 2020, aux termes desquels le ministre chargé de l'Économie abaisse de 25% à 10% le seuil de détention de droits de vote déclenchant la procédure de contrôle.

Une réforme limitée

Cette réforme est toutefois limitée à trois égards. Elle n'est applicable que jusqu'au 31 décembre 2020, ne concerne que les investisseurs d'État tiers à l'Union et à l'Espace économique européen, et est circonscrite aux seules sociétés cotées françaises. Afin de réduire l'impact de cette mesure sur la libre circulation des capitaux, une procédure allégée a également été prévue. En effet, l'investisseur étranger est dispensé de la demande d'autorisation préalable. Le projet d'investissement doit seulement être notifié auprès de la Direction générale du Trésor et être réalisé dans un délai de six mois à compter de la notification. Un doute demeure quant à la personne compétente pour notifier le projet d'investissement. Il semble, à la lecture de l'arrêté, que l'investisseur mais aussi la société cible puissent notifier l'investissement.

Enfin, rompant avec le principe selon lequel le silence du ministre vaut refus, le décret prévoit que l'autorisation naît à l'issue d'un délai de dix jours ouvrés à compter de la notification (ce qui est clairement une bonne nouvelle). Un renforcement donc mais mis en œuvre de manière très pragmatique, ce qui est louable. Le gouvernement a entendu les vœux des industriels sur ce point et l'on devrait pouvoir s'attendre à une application très ciblée de ces mesures dont la vocation est de préserver les actifs stratégiques en ces temps de crise particulière sans pour autant décourager les investisseurs.

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Commentaire 1
à écrit le 11/08/2020 à 8:38
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et puis ca evite les vraies questions.... pourquoi on se vend a des etrangers plutot qu'a des francais......... et la, clairement, les reponses on les connait, et ca ne fera pas plaisir aux politicards verreux ( euh oui, qui voudraient compenser par ...

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