Gabriel Attal, une jacquerie pour commencer

EDITO - Retrouvez l'éditorial de Bruno Jeudy, directeur délégué de La Tribune Dimanche.
Bruno Jeudy
Bruno Jeudy (Crédits : DR)

Le plus jeune Premier ministre est bien loin de ses bases : le monde paysan n'est pas le sien. Le nouveau chef du gouvernement entame donc son bail à l'hôtel de Matignon avec un sujet explosif dont les multiples raisons, qu'elles soient économiques, sociales, écologiques voire sociétales, seront difficiles à démêler. L'élu des Hauts-de-Seine ne craint pas le terrain mais il avance prudemment. Le voilà pourtant contraint d'éteindre rapidement le feu dans les campagnes tout en découvrant le dossier.

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Au-dessus de lui, le président de la République a toujours eu une attention particulière pour ce secteur qui souffre et qui est pourtant essentiel, encore davantage à l'heure de la souveraineté alimentaire. Jusqu'à présent, il a toujours trouvé les moyens, avec ses ministres de l'Agriculture successifs, de calmer la colère sourde de paysans ulcérés d'être les boucs émissaires du dérèglement climatique alors qu'ils en sont les premières victimes. Selon une enquête de l'Ifop, Emmanuel Macron était même leur candidat préféré en 2022.
En coulisses, le chef de l'État a senti monter la crise. Mardi dernier, il a adressé des signaux en valorisant à la télévision la 
« France du bon sens plutôt que la France des tracas ». Dans la foulée, il a mobilisé les préfets. Cela sera-t-il suffisant pour éviter que les paysans en colère se transforment en « gilets verts » ? Pas certain. Le mécontentement vient de la base, pas vraiment d'accord avec la FNSEA, syndicat agricole puissant dominé par les « gros » agriculteurs et jugé trop conciliant avec le gouvernement.

Cinq mois avant les élections européennes, le Rassemblement national est aux aguets. Marine Le Pen et Jordan Bardella soufflent grossièrement sur les braises et veulent surfer sur une colère agricole qui se répand dans toute l'Europe. Leur cible : le Green Deal, qui laisse trop peu de temps pour s'adapter à la transition écologique. Première puissance agricole, la France a perdu les trois quarts de ses paysans en un demi-siècle. Touchée de plein fouet par la crise inflationniste et de l'énergie, une partie de la profession se sent abandonnée par les pouvoirs publics. La crise n'est pas seulement économique, elle est aussi sociétale. En France, on adore la nostalgie, mais aimons-nous encore nos agriculteurs ? Les Français ont fait un triomphe au cinéma à Petit Paysan ou Au nom de la terre, mais que savent-ils de leurs difficultés quotidiennes ? Déjà au pied du mur, Gabriel Attal devrait relire les observations de Montesquieu : « J'aime les paysans, ils ne sont pas assez savants pour raisonner de travers. »

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Commentaires 6
à écrit le 22/01/2024 à 14:27
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"la France a perdu les trois quarts de ses paysans en un demi-siècle." C'est normal dans la mesure où la restructuration de la filière s'est faite tardivement par rapport à d'autre pays, la surreprésentation des agriculteurs dans le cortège des gra...

à écrit le 21/01/2024 à 12:26
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Voilà un très bon exemple de mépris social chimiquement pur.

à écrit le 21/01/2024 à 10:08
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Rousseau, président de la FNSEA interrogé ce matin, a été incapable de dire quelle était la 1ère revendication à satisfaire, c'est dire le peu de maitrise qu'il a sur son organisation. Comment dans ces conditions trouver un terrain d'accord ?

à écrit le 21/01/2024 à 10:07
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Rousseau, président de la FNSEA interrogé ce matin, a été incapable de dire quelle était la 1ère revendication à satisfaire, c'est dire le peu de maitrise qu'il a sur son organisation. Comment dans ces conditions trouver un terrain d'accord ?

à écrit le 21/01/2024 à 8:51
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Aucun journaliste n 'a posé la moindre question sur le monde agricole au président lors de sa conférence de presse , n'existe t il que des journalistes parisiens ?

à écrit le 21/01/2024 à 8:50
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"le monde paysan n'est pas le sien" Ah non là je suis désolé mais ce mode paysan là manipulé par les marchés financiers est bel et bien en plein dans son monde à lui. Les agriculteurs ne sont que des larbins de la finance tout comem eux les politicie...

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