« L'Europe doit défendre ses intérêts dans l'espace et protéger son accès à l'espace » (Josep Borrell et Thierry Breton)

OPINION- L'Europe est confrontée à une grave dégradation de son espace de sécurité, avec le retour de la guerre sur notre continent et l'intensification des menaces qui pèsent sur nos sociétés démocratiques. De plus en plus, l'avenir de nos infrastructures critiques dépend de ce qui se passe dans le domaine cyber et dans l'espace. L'Europe doit être en mesure de protéger ses intérêts. Par le Haut représentant de l'Union pour les Affaires Étrangères et la Politique de Sécurité et Vice-président de la Commission européenne (HR/VP) Josep Borrell et le Commissaire au marché intérieur Thierry Breton
« L'Union européenne redoublera également d'efforts pour promouvoir des comportements responsables dans l'espace et prévenir toute course aux armements par le biais de normes et de règles multilatérales » (Josep Borrell Thierry Breton)
« L'Union européenne redoublera également d'efforts pour promouvoir des comportements responsables dans l'espace et prévenir toute course aux armements par le biais de normes et de règles multilatérales » (Josep Borrell Thierry Breton) (Crédits : DR)

À mesure que l'espace devient un domaine de compétition géopolitique, il est de plus en plus encombré et contesté. Prenons, par exemple, la décision de la Russie, en novembre 2021, de tester un missile antisatellite, générant des débris spatiaux qui persisteront pendant des décennies. Depuis, la Russie a menacé d'attaquer d'autres satellites. En outre, la nuit précédant l'invasion de l'Ukraine par la Russie, une cyberattaque a mis hors service une partie du réseau de télécommunications par satellite Viasat, affectant de nombreux États membres de l'UE. Plus généralement, nous savons que nos concurrents testent et déploient divers moyens d'interdire l'accès aux systèmes et services spatiaux : armes antisatellites, usurpation et brouillage des signaux satellites, cyberattaques, prises de contrôle hostiles d'entreprises spatiales, etc...

En bref, notre sécurité dans l'espace est en danger, ce qui signifie que notre sécurité sur terre l'est tout autant. Les services spatiaux sont en effet essentiels pour notre économie, la vie quotidienne de nos citoyens et notre sécurité. Peu importe que ces services soient fournis par des systèmes spatiaux de l'UE tels que Galileo (pour le positionnement, la navigation et la synchronisation), Copernicus (pour l'observation de la Terre) ou IRIS (pour les communications sécurisées) ou par d'autres acteurs spatiaux publics et privés opérant en Europe. Dans tous les cas, la privation de services spatiaux essentiels aurait des conséquences dramatiques.

L'Europe doit protéger ses intérêts

L'Europe doit donc défendre ses intérêts dans l'espace et protéger son accès à l'espace. C'est ce que préconise la boussole stratégique de l'UE. C'est pourquoi nous avons présenté le mois dernier la toute première Stratégie Européenne de l'Espace pour la Sécurité et la Défense. La nouvelle stratégie marque un changement de paradigme, et ce à plusieurs égards.

Premièrement, elle nous donnera les moyens de mieux comprendre les actions hostiles de nos concurrents. En soutenant les capacités nationales, en encourageant le partage d'informations et en faisant appel à la communauté du renseignement de nos États membres, nous améliorerons notre compréhension commune des menaces spatiales et renforcerons notre connaissance du domaine spatial afin de détecter rapidement les comportements irresponsables et hostiles.

Deuxièmement, nous veillerons à ce que les services spatiaux essentiels soient plus solides et plus résistants, notamment grâce à une nouvelle législation européenne sur l'espace qui définira des règles communes en matière de sûreté, de sécurité et de durabilité dans l'espace. Ce nouveau cadre juridique favorisera l'échange d'informations sur les incidents de sécurité ainsi que la coordination et la coopération transfrontalières. L'objectif est que tous les États membres disposent d'un niveau minimum commun de résilience pour les services spatiaux critiques ou élaborent des plans nationaux coordonnés de préparation et de résilience ainsi que des protocoles d'urgence.

Nous réduirons également nos dépendances stratégiques en protégeant nos chaînes d'approvisionnement dans le secteur spatial et en développant des technologies spatiales essentielles. Pour ce faire, nous stimulerons notre industrie spatiale, en nous appuyant sur notre base industrielle établie, ainsi que sur les entreprises dites du « New Space ».

Organiser une capacité de réaction

Troisièmement, nous organiserons notre capacité à réagir lorsque nos intérêts de sécurité sont en danger. Alors qu'à l'heure actuelle, l'UE a la responsabilité de réagir aux menaces spatiales uniquement lorsqu'elles affectent les éléments des programmes spatiaux de l'UE, notre ambition est d'étendre le mécanisme de réaction de l'UE aux menaces qui pèsent sur tout service ou infrastructure spatiale affectant la sécurité de l'UE et de ses États membres.

En outre, à l'instar de la boîte à outils de cyberdiplomatie pour les cyberattaques, nous renforcerons les mécanismes et les cadres qui, sur la base de preuves solides, nous permettront de réagir et de prendre des mesures de réponse proportionnées et opportunes au niveau de l'UE, qu'elles soient techniques, diplomatiques, économiques ou militaires. Des exercices réguliers dans le domaine spatial nous aideront également à tester et à améliorer nos mécanismes de réponse.

Quatrièmement, nous tirerons le meilleur parti de nos infrastructures spatiales pour soutenir la défense et la sécurité. L'imagerie satellitaire a largement contribué à aider l'Ukraine à résister à l'attaque de la Russie. IRIS, notre nouveau programme de connectivité sécurisée, assurera la sécurité des communications gouvernementales, y compris pour les applications de défense. Nous développerons également de nouveaux services spatiaux dans le domaine de l'observation de la Terre, tout en renforçant la capacité unique d'analyse du renseignement géospatial du Centre satellitaire de l'UE.

Garantir un accès autonome à l'espace

Nous prendrons des mesures pour garantir à long terme l'accès autonome de l'UE à l'espace, ce qui est essentiel pour pouvoir réagir rapidement à tout incident dans l'espace. Nous soutiendrons le développement de solutions de lancement innovantes et réactives, telles que les micro-lanceurs et les lanceurs réutilisables, qui répondront aux besoins des acteurs de la défense.

Enfin, nous savons que la coopération avec les partenaires est indispensable. Nous pouvons compter sur nos partenaires et nos alliés au sein de l'OTAN avec lesquels nous continuerons à développer des dialogues sur la sécurité et la défense de l'espace.

L'UE redoublera également d'efforts pour promouvoir des comportements responsables dans l'espace et prévenir toute course aux armements par le biais de normes et de règles multilatérales. La diplomatie reste notre première ligne de défense. À titre d'exemple concret, nous saluons et soutenons l'interdiction des essais de missiles antisatellites destructeurs récemment proposée par les États-Unis et à laquelle certains États membres de l'UE ont déjà adhéré, conformément à la résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies de 2022 sur ce sujet.

Face à l'évolution et à l'intensification des menaces, l'UE adapte son approche de l'espace en y intégrant pleinement les enjeux pour notre sécurité et notre défense. Tout cela fait partie de la construction de l'Europe géopolitique que nos citoyens attendent.

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Commentaires 4
à écrit le 21/06/2023 à 13:32
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Vraiment étrange. La Commission Von Der Layen arrive à son terme l’année prochaine et Breton nous délivre un catalogue d’intentions comme si il venait juste d’arriver aux affaires. Attendons d’abord les résultats de cette Commission (notamment le fam...

à écrit le 21/06/2023 à 10:51
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Le premier intérêt de la France à protéger, c'est sa main d'oeuvre qualifié. Les faits prouvent que la pérennisation de l'emploi est une garantie de maintenir un haut niveau de compétences dans notre pays. Le dumping destructeur favorisé par l'europe...

à écrit le 21/06/2023 à 10:09
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il n'y a pas d'europe sur le nucleaire comme d'autres sujet c'est l'allemagne qui dicte le point finale et la france se couche toujours il faut une colere tres forte pour que les chose bouge le probleme c'est qu'il n'y a personne pour obtenir un ...

à écrit le 21/06/2023 à 9:55
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Ah il est dans les étoiles en ce moment notre titi !

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