Kjell Nordström : le capitalisme est une machine pour trier les bons des mauvais

Auteur avec Jonas Ridderstrålle de « Funky Business » et de « Karaoke Capitalism », Kjell Nordström, a une vision décapante de notre environnement économique. Voici quelques idées glanées lors du « Premier Business Leadership Series » de SAS Institute à Londres.

 

La crise du capitalisme, évoquée par certains commentateurs ? Le capitalisme n'a jamais été aussi en forme qu'aujourd'hui. Le capitalisme n'est pas une idéologie, c'est une machine qui fonctionne très bien et qui n'a aucun problème. General Motors a un problème, Royal Bank of Scotland a un problème, Volvo a un problème mais le capitalisme se porte très bien. Cette machine peut trier les acteurs efficaces (Toyota) des acteurs inefficaces (Ford, General Motors) dans l'automobile. Il peut faire la même chose avec les hôtels, les fabricants de chaussures et les restaurants fast food. Les plus efficaces sont récompensés, les autres disparaissent.

Cependant, il existe des forces en présence qui vont modifier sensiblement le fonctionnement de la machine capitaliste.

La première est que le corps professoral a été pris d'assaut par les femmes. Dans les facultés européennes plus de 75% des postes sont occupés par des femmes. On découvre le même phénomène au Maroc ou dans les Emirats Arabes Unis. S'il n'existe pas beaucoup de différences entre les hommes et les femmes, certaines sont intéressantes en terme de prise de décision et de gestion des risques.

Ainsi, Muhammad Yunus, le créateur de la Gameen Bank qui distribue des micro-crédits, ne compte que des femmes parmi ses clientes.  La raison en est simple : elles remboursent leur crédit. Les hommes, eux, sont plus incertains. Pour un banquier, la femme est un bon risque.

Cette emprise des femmes dans l'université aura un impact massif dans la politique, le marketing et le leadership. La distribution du profile de risque est fondamentalement différente de celle des hommes.

Autre fait : selon des statistiques collectées dans 600 grandes villes mondiales, les foyers fiscaux sont de plus en plus constitués par des célibataires. L'institution familiale en a pris un coup. Cela aussi va affecter la distribution, les transports publics, la santé, et, généralement, toute l'industrie des services.

Il y a trente ans, le taux de natalité était le plus important dans les pays d'obédience catholique : Italie, Espagne, Portugal, Irlande. Aujourd'hui, c'est le contraire et ce sont les pays nordiques qui remportent la palme de la natalité.

Quand à l'habitat, 52% de l'humanité habite dans des villes. En 2020, ce pourcentage sera passé à 75% et à 90% en 2040. Cette urbanisation massive signifie que le pays nation va disparaître. On ne parlera plus de l'Autriche mais de Vienne. L'Europe sera un ensemble de 400 cités reliées entre elles par divers réseaux.  Certains de mes clients internationaux ne considèrent plus les pays pour analyser leurs affaires. Ikéa est présent à Philadelphie, Seattle et deux ou trois autres centres urbains.

La dynamique du capitalisme. En moins de 20 ans, 3,6 milliards de personnes se sont connectés à la machine capitaliste : la Pologne avec 55 millions, la Russie avec 130 millions, le Pakistan avec 180 millions, le Vietman avec 64 millions..

Ces gens veulent en profiter. C'est un phénomène fantastique qui nous a donné une longue période de croissance économique. Ils sont toujours là et leurs rêves d'obtenir une vie meilleure ne seront pas remis en question.

La place des Etats-Unis dans cette vision ? De plus en plus importante. Il n'existe pas d'autres endroits de la planète capable de rivaliser, que cela soit en terme de consommation d'énergie, de PIB par habitant, ou d'universités. Sur les dix meilleures universités dans le monde, neuf sont américaines, sur les cent meilleures, soixante-quinze sont américaines. Et n'oublions pas la dominance massive des Etats-Unis en prix Nobel. Cela ne va pas changer pendant les trois prochaines générations. Pourquoi ? Parce que les Etats-Unis ne forment pas un pays mais une idée.

Cela veut dire que n'importe qui peut devenir américain. On peut se connecter et, au bout de trois ans, on devient américain. Les Etats-Unis attirent les meilleures personnes du monde entier. Google, dont tout le monde parle, a été créé par Larry Page et Sergei Brin, un russe. Il y a trois ans, j'ai donné une présentation devant les 100 cadres les plus senior de Siemens. C'est une société de 175 ans qui emploie 473.000 employés.  Sur ces 100 cadres, un seul n'était pas allemand. C'était un autrichien. Ce type de pratique n'existe pas à l'Université de Stanford. Dans la Silicon Valley, 80% des gens qui travaillent viennent d'un autre pays. Cela s'appelle la méritocratie.

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