Contre l'homophobie, on n'est jamais trop aidé

TRIBUNE. À l'occasion de la journée mondiale de lutte contre l'homophobie et la transphobie, le 17 mai, La Tribune s'engage contre toutes les discriminations dans l'entreprise. Frank Tapiro, chief Emotion Officer de Datakalab et consultant créatif, revient sur le choix de la Une de l'édition spéciale LGBT en entreprise de La Tribune, à paraître demain en kiosques.
(Crédits : La Tribune)

L'homophobie est une maladie transmissible qui ne s'enraye pas facilement. A l'occasion de la journée internationale de lutte contre l'homophobie et la transphobie, en mai 2016, j'ai proposé à l'association Aides France de lancer un médicament pour guérir ceux qui souffrent de cette haine tenace et destructrice. Homophobiol© est le premier traitement qui, grâce à un bonbon Harlequin multicolore à sucer au pouvoir surpuissant, calme la douleur, adoucit le langage et le comportement en cas de crise aiguë d'homophobie. Homophobiol© existe aussi en patch pour une cure quotidienne contre les symptômes d'homophobie latente. Son effet immédiat permet aux plus homophobes d'entre nous de se reconnecter à l'autre et d'accepter sa différence. Pour les sujets les plus coriaces, un suppositoire est à l'étude.

Le buzz énorme qu'a provoqué Homophobiol© partout dans le monde démontre à quel point la communauté LGBT a compris qu'une bonne communication pour la cause ne se résumait pas uniquement à dénoncer mais à proposer : provoquer le débat en faisant sourire plutôt que de condamner. Ce médicament à l'effet Placebo prouve à quel point il faut sortir du cadre pour tenter de toucher l'opinion sur un sujet aussi compliqué et dévastateur. Les campagnes moralisatrices ne servent à rien. Les discours « corporate », mous et éthérés non plus. Il faut surprendre, provoquer, bousculer, interpeller avec courage, non pas pour imaginer qu'une simple campagne puisse résoudre le problème mais pour susciter le débat et créer un appel d'air entre les deux hémisphères. Pour cela il faut créer une émotion, laisser une trace, un souvenir, pour pousser à réfléchir et agir.

On a vu trop souvent des campagnes alibi aussi inutiles qu'inodores donner bonne conscience à leurs auteurs plutôt que d'impacter sur la conscience citoyenne, donnant l'illusion aux associations d'avoir défendu une cause pour laquelle elles ont été mandatées avec la peur au ventre. Peur de trop dire ou pas assez. Peur d'être critiquées ou raillées par la communauté pour avoir osé. Peur de subir des lazzis, des quolibets, comme ils disent. La seule chose dont on doit pourtant avoir peur quand on communique, c'est de ne pas dépasser la barrière de l'indifférence pour provoquer le droit à l'indifférence. C'est ce qu'on doit à ceux qui souffrent et qui n'osent pas assumer ce qu'ils sont et ceux qu'ils aiment. Les agressions, les moqueries et les insultes qu'ils subissent sont bien réelles.

Une prise d'aïkido sémantique

Voilà le point de départ de cette campagne pour La Tribune. Utiliser le préfixe d'une insulte homophobe malheureusement universelle en la transformant avec bienveillance pour faire une prise d'aïkido sémantique à leurs auteurs. ENCourager les LGBT en entreprise comme un pied de nez à ceux qui ne peuvent pas les ENCadrer. ENCourager celles et ceux qui ont encore du mal à fuir le regard de l'autre comme une réponse aux insultes qu'ils ne peuvent ENCaisser.

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UNE Hebdo H292

[Notre hebdomadaire à retrouver demain, en kiosques]

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C'est bien la première fois qu'on applique le transgenrisme aux mots. Il y a vingt ans j'aidais mon ami Dave à faire son coming out publicitaire pour les Fromages de Hollande. Ce fut la première campagne du genre qui, grâce au décalage et à l'humour corrosif de Dave, a démontré qu'on pouvait lutter contre cette violence homophobe avec humour et légèreté. La France entière découvre alors que, contrairement à la rumeur, « Dave aime l'Edam ». Ce slogan a permis à Dave - qui ne s'est jamais positionné en porte-parole de la communauté - d'utiliser son capital sympathie éternelle pour diffuser de l'énergie positive envers celles et ceux, moins connus que lui, qui souffraient en silence. Elle a aussi permis aux fromages de Hollande de se faire une petite place sur le plateau de fromages des Français, comme un symbole sur la place des LGBT dans notre société.

Certes, cette nouvelle campagne pour La Tribune ne plaira sûrement pas à tout le monde et j'en vois déjà certains qui se bouchent le nez aujourd'hui et qui voleront au secours de la victoire si elle provoque un débat constructif. Bravo à Jean-Christophe Tortora, Philippe Mabille et toute la rédaction de La Tribune de rappeler à quel point le rôle d'un titre de presse est aussi de s'engager et d'encourager ses lecteurs à briser les idées reçues et changer la donne. Je vous souhaite sincèrement d'aller tous vous faire encourager par La Tribune.

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Commentaires 5
à écrit le 18/05/2019 à 8:08
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Alors, pour ma part, je l'ai trouvée opportuniste cette campagne. Opportuniste car elle a centré la réaction sur la question de l'audace d'un journal, sur le culot des auteurs et du coup, les LGBT se sont retrouvés déménagés du centre de la scène ver...

à écrit le 17/05/2019 à 8:52
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Bravo pour le jeu de mot,stop au politiquement correct. je vous felicite !!

à écrit le 17/05/2019 à 0:28
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Le titre de l'article...c'est quand même très limite, si ce n'est insultant, et vraiment trop facile...surprenant venant de La Tribune.

le 17/05/2019 à 18:13
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je rejoins vos propos a consommer avec modérations !

à écrit le 16/05/2019 à 13:25
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D'autant qu'il faut être quand même sacrément stupide pour être homophobe quand on est hétéro ! Moins d’hétéro sur le marché égal plus de possibilités ! Notre côte monte les gars ! :-) On peut donc supposer comme beaucoup l'affirment déjà que les...

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