Faut il s'attaquer à Android ?

La commission européenne s'inquiète du poids du système Android. Mais l’économie européenne ne peut se satisfaire d’un écosystème mobile fragmenté Par Benoît Felten, Fondateur Diffraction Analysis

 Avec 500 millions de téléchargements en quelques semaines, PokemonGo a été le phénomène de l'été 2016. Des centaines, milliers, millions de personnes ont commencé à passer des heures rivées à leur smartphone dans l'espoir d'attraper des animaux étranges. Ce jeu, au-delà du phénomène de société, a montré la toute puissance de l'écosystème mobile. Des milliards d'utilisateurs, des contenus qui se répandent à grande vitesse, une adoption de nouveaux comportements sans aucune barrière. Cela dénote avec la présentation faite par la Commission européenne de son enquête relative à Android, le système d'exploitation pour smartphone de Google. "Android étouffe l'innovation", avait alors déclarée la Commissaire européenne.  Mais est-ce réellement le cas?

 Des habitudes transformées

En l'espace d'une décennie, les smartphones ont totalement transformé nos habitudes de communication, d'accès à l'information, et de divertissement. Ces terminaux ont presque relayé au second plan les fonctionnalités d'appel et d'envoi de SMS, pour faire la part belle aux jeux, réseaux sociaux, services de cartographie et autres. Cette transformation a été possible en grande partie grâce à de nouvelles plateformes avec, en tête, iOS et Android. Bien qu'iOS ait été pionnier en 2007, c'est bien Android, lancé en 2008, qui a permis de démocratiser l'accès au mobile. Prix en baisse pour les consommateurs, système d'exploitation gratuitement accessible à tous et de nouvelles opportunités pour les opérateurs mobiles et développeurs d'applications.

La nature open source d'Android

Côté innovation, la nature open source d'Android permet une appropriation et une personnalisation de ce système d'exploitation par tous les acteurs en favorisant l'expérience utilisateur. Les constructeurs, par exemple, peuvent choisir d'intégrer le système d'exploitation sur leurs terminaux avec peu ou pas de changement (Motorola) ou opter, au contraire, pour le développement d'interfaces spécifiques (Samsung et OnePlus). Certains décident même d'avoir recours à une version créée, à partir du code source Android originel, et complété par un développement indépendant, créant de fait un système d'exploitation distinct, appelé fork. Cyanogen Mod, ColorOS, MIUI sont parmi ceux là. Certains de ces fork, à l'extrême, peuvent aboutir à des écosystèmes fermés  comme FireOS, le système d'exploitation créé par Amazon basé sur Android et installé sur les appareils de la marque. Sur cette plateforme, les modifications du code source sont telles que certaines applications développées pour Android ne peuvent plus fonctionner. La logique d'Amazon est ici différente, il s'agit pour la marque de construire son propre univers autour d'un environnement propriétaire et verticalement intégré.

Cette personnalisation des smartphones s'étend également aux contenus qui y sont présents, les constructeurs et les opérateurs mobiles décidant quels types de services et applications ils souhaitent y faire figurer. En moyenne, c'est une cinquantaine d'applications qui sont présentes par défaut sur un téléphone acheté en Europe.

La compatibilité a permis l'émergence d'un écosystème cohérent

Comme évoqué précédemment, le code source d'Android peut être utilisé, modifié et distribué par n'importe qui, sans contrepartie ni accord de Google. S'il est possible d'élaborer un système d'exploitation totalement différent à partir du code source d'Android, c'est bien la compatibilité qui a permis l'émergence d'un écosystème cohérent, riche et surtout plus sûr pour le consommateur. En regardant 5 ans en arrière, l'absence de compatibilité a été fatale à Nokia et à son système Symbian. Elle a empêché l'explosion de l'univers mobile, de son 1,4 milliard d'utilisateurs et de ses 2 millions d'applications auquel on assiste aujourd'hui. Le défi est donc de savoir comment préserver cette diversité et pluralité tout en garantissant une constance pour les développeurs et les consommateurs. La lutte contre la fragmentation est déjà un enjeu aujourd'hui. Il le sera plus demain.

La mobilité est, certes, un terme à la mode mais avec de réelles concrétisations. Les tablettes et les smartphones sont aujourd'hui reliés à des montres, lunettes, box d'opérateurs et même à la voiture. Comment s'assurer qu'un consommateur aura toujours le choix et pourra librement migrer d'un univers à un autre, d'une marque à une autre? Au final, c'est aussi notre économie au global qui pourrait être impactée.  L'écosystème Android est aujourd'hui considérable : il est aujourd'hui évalué à plus de 1,2 million emplois en Europe. La Commission européenne estime qu'il pourrait atteindre 4,8 millions d'emplois d'ici 2020. Sous réserve de faire les bons choix.

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Commentaire 1
à écrit le 10/11/2016 à 17:26
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Écosystème cohérent pour le milieu industriel et financier sinon pour le consommateur android est une véritable passoire à publicités et autres parasites du genre. Alors certes pour les industriels c'est formidable d'avoir accès à tout le réperto...

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