La sortie de crise en Europe passera par l'inflation

OPINION. Les gouvernements européens et américain ont aujourd'hui en tête le retour de l'inflation, moyen d'effacer une partie des dettes publiques qui ont explosé avec la crise sanitaire. Dans cette optique, certains secteurs industriels pourraient en profiter plus que d'autres. (*) Par Laurent Chaudeurge, porte parole de la gestion, BDL Capital Management
(Crédits : Reuters)

Par-delà la crise actuelle de la Covid, c'est un tout nouveau régime économique qui s'ouvre actuellement en Europe. Et pas seulement pour les mois à venir. L'Europe a subi presque 10 années d'austérité budgétaire, jusqu'au début de 2020. Une austérité imposée par les traités, dont les pays du Nord veillaient au strict respect... mais la nouvelle donne mondiale les a conduits à changer radicalement d'optique, Allemagne en tête. Il n'est plus question, aujourd'hui, que de relance via le budget, y compris au niveau européen.

Ce changement de pied tient à la fois à l'ampleur de la crise, qui impose un effort de solidarité entre pays de l'UE et à une froide analyse de la situation économique mondiale. Dans le contexte actuel de « déglobalisation », la croissance allemande ne pourra plus, à l'avenir, s'appuyer sur les exportations vers l'Asie, comme cela a été le cas depuis 15 ans. Outre Rhin, les entreprises ont donc aujourd'hui besoin des consommateurs européens. C'est le sens que l'on peut donner au plan de relance de l'économie européenne, conçu par le duo Macron-Merkel. Pour la première fois, les pays « vertueux » du Nord de l'Europe acceptent de mettre une partie de leurs ressources financières en commun avec ceux du Sud (Italie, Espagne), jugés moins sérieux. Objectif : soutenir la demande européenne, et donc, indirectement, les achats de produits made in Germany. En attendant que ce plan soit mis en œuvre, Berlin a déjà signé de gros chèques en faveur des ménages allemands, avec 40 milliards d'euros de soutien direct à leurs revenus, sous forme d'aide directe ou de baisse de TVA. Les hausses salariales qui s'annoncent en Allemagne -le salaire minimum augmentera de 12% d'ici 2022 - déboucheront aussi sur des carnets de commandes plus fournis dans les entreprises outre Rhin. Avec un effet d'entraînement sur l'ensemble de l'économie européenne.

Doper la production réelle

Cette nouvelle politique de soutien à la demande vise à doper la production réelle, mais aussi à raviver l'inflation. La combinaison d'une politique monétaire toujours très accommodante et, désormais, d'une relance budgétaire, devrait logiquement amener un surcroît de hausse des prix, après des années de situation quasi-déflationniste. Même s'ils ne le crient pas sur les toits, les gouvernements européens ont aujourd'hui en tête ce retour à l'inflation. La Banque centrale américaine, la Fed, vise clairement cet objectif. Et elle convainc les marchés : déjà, les anticipations de hausse des prix remontent aux Etats-Unis.  Les autorités voient là le moyen d'effacer les dettes publiques colossales héritées de la crise sanitaire.

Un surcroît d'inflation permet-il vraiment de réduire la dette ? L'exemple américain de l'après deuxième guerre mondiale est assez probant, à cet égard. La dette publique des Etats-Unis avait grimpé à 116% du PIB en 1946, en raison bien sûr de l'effort de guerre. Grâce à une hausse des prix d'un peu plus de 6% en moyenne au cours des années suivant le conflit mondial -rien à voir avec l'hyperinflation européenne qui sévissait alors-, le stock de dette américain a pu être ramené à 78% du PIB en 1951. C'est bien ce à quoi pensent aujourd'hui ceux qui ont en charge la politique économique en Europe, même si l'inflation n'atteindra pas rapidement un tel niveau.

Un autre point de vue sur les entreprises

Ce nouveau paradigme macro-économique conduit à changer de point de vue sur les entreprises européennes. Pendant toutes les années 2010, les plus performantes ont été celles dont la croissance pouvait être qualifiée de structurelle, car impulsée par les évolutions des modes de consommation dans le monde. Elles ont bénéficié de marchés porteurs, quelle que soit la croissance du PIB. On peut mentionner l'industrie française du luxe, par exemple, profitant d'une forte demande internationale. A l'inverse, les entreprises dépendantes du cycle économique européen se trouvaient sous contrainte, affichant des croissances particulièrement faibles. L'automobile, la construction, l'intérim...  étaient dans ce cas. La situation s'inverse dans le nouveau contexte de relance budgétaire. Ces entreprises cycliques ont à nouveau le vent en poupe. Les investisseurs sur les marchés actions ont tout intérêt à le prendre en compte.

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Commentaires 7
à écrit le 11/12/2020 à 0:06
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L inflation? Mais ç est la boîte de Pandore on n est plus dans les années 70... Avec le plafonnement des salaires actuel et futur c est casser la consommation et donc l‘ économie en France . quand aux pays exportateurs comme l’ Allemagne ses clie...

le 12/12/2020 à 10:46
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retour de l inflation accompagnée comme il se doit de hausse salariale , une tres bonne chose et économiquement beaucoup plus saine que la spirale deflationiste que nous vivons depuis 10 Ans.

à écrit le 10/12/2020 à 19:53
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??? L'inflation ???Histoire d'euthanasier les vieux dont le Covid n'aura pas voulu. De toutes façons, ce sont les vieux qui feront les frais de la pandémie. C'est aussi dans la logique des choses. Malheureux celui qui n'a pas conscience d'être mort...

le 12/12/2020 à 10:43
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il me semble que les vieux qui ont du capital immobilier de part leur residence principal seront plutot avantages.Certe le montant de leur retraite réelle sera revue a la baisse

à écrit le 10/12/2020 à 19:08
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L'inflation est nécessaire pour nourrir le socialisme car sans cela, les fonctionnaires devront découvrir la valeur "travail"...

à écrit le 10/12/2020 à 17:16
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Profitez en pour budgétiser la Sécurité Sociale grâce a un prélèvement sur la TVA, cela rendra nos entreprises locales plus compétitives et entraînera une diminution du chômage! Mais le veulent ils vraiment?

à écrit le 10/12/2020 à 16:05
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Le seul probleme du raisonnement c est que l inflation ca ne se decrete pas. Les prix des produits ne vont pas augmeneter concurrence internationale oblige. Les salaires encore moins (chomage et si ca ne suffit pas le papy boom va imposer de taxer pl...

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