Municipales : les enjeux métropolitains, grands absents des prochaines élections

POLITISCOPE. Malgré l'attribution, progressive, de compétences supplémentaires aux intercommunalités et communautés urbaines, les sujets liés aux enjeux métropolitains demeurent dans l'angle mort des médias à l'approche des élections municipales. Preuve en est : le Grand Paris, éclipsé, notamment, par la proposition choc de Benjamin Griveaux.
Marc Endeweld
Dans les communes du Grand Paris, rares sont les candidats à avancer des projets à l’échelle de la métropole.
Dans les communes du Grand Paris, rares sont les candidats à avancer des projets à l’échelle de la métropole. (Crédits : iStock)

Certes, en ce début d'année, l'actualité est surchargée : conflit sur les retraites, grands incendies en Australie, tensions au Moyen-Orient, sans parler du coronavirus en Chine, qui inquiète tant. N'empêche, en dehors du duel Griveaux-Villani à Paris, les grands médias en général, et les chaînes d'information en continu en particulier, ne parlent guère des prochaines élections municipales, encore moins des programmes des différents candidats.

Alors, quand le sujet est finalement abordé, c'est sous l'angle des questions habituelles de propreté ou d'insécurité. La « pro-xi-mi-té », est le maître mot. Résultat : les (vrais) enjeux métropolitains ne sont quasiment jamais abordés. Ce sont les grands absents des prochaines élections.

Montée en puissance des échelons intermédiaires

Dans une France majoritairement urbaine, ceux-ci devraient pourtant se retrouver au cœur des débats publics en vue des municipales. Aujourd'hui, la mobilité, le logement, l'emploi, mais également le développement économique, sont autant de sujets traités au niveau des communautés urbaines et des intercommunalités.

Longtemps, ces échelons si stratégiques de la démocratie locale restèrent éloignés des électeurs. Les conseillers communautaires étaient élus au suffrage universel indirect. Le consensus entre gauche et droite prédominait dans ces instances présentées comme techniques.

Celles-ci détiennent pourtant l'essentiel du pouvoir local. Depuis 2014, on a assisté au début de leur politisation : avec la mise en place de l'élection au suffrage direct « fléché » dans les communes de plus de 1. 000 habitants, plus de 80 % des électeurs (soit 4 sur 5) sont conduits à désigner leurs représentants au sein des conseils communautaires ou métropolitains.

À Lyon, avec la création en 2015 de la Métropole, première collectivité à statut particulier qui regroupe communauté urbaine et département du Rhône, les prochaines élections, municipales et métropolitaines, sont désormais deux scrutins distincts.

L'intercommunalité gagne légèrement en visibilité

Malgré ces évolutions, élus comme médias continuent d'ignorer la plupart du temps les enjeux métropolitains. Au nom de ladite « proximité », responsables politiques comme journalistes ne s'aventurent guère sur le sujet de l'aménagement urbain. Un « terrain » délaissé, et finalement laissé aux mains des experts urbanistes et autres promoteurs.

L'Assemblée des communautés de France (AdCF) se réjouit néanmoins de récents progrès :

« La visibilité de l'intercommunalité à l'occasion des campagnes électorales progresse sensiblement par rapport à 2014, ce qui n'est pas difficile tant elle fut alors occultée. En ce début 2020, la supervision des campagnes opérée par l'équipe de l'AdCF à partir des articles de la presse quotidienne régionale, des émissions des radios et TV locales ou des sites des candidats... permet de constater des changements notables et une intercommunalisation progressive des débats. »

Le Grand Paris, grand absent des débats

C'est en région parisienne que la situation est la plus caricaturale. Alors que les Jeux olympiques doivent être organisés en 2024, l'absence d'un débat métropolitain autour du Grand Paris est patent.

« Exception confirmant la règle, la métropole du Grand Paris n'apparaît pour l'instant que très peu dans les campagnes des candidats à Paris ou des communes limitrophes, confirme l'AdCF. La spécificité de cette métropole, sans réelle compétence opérationnelle, explique son manque de lisibilité. »

C'est dire si les propositions récentes de Benjamin Griveaux et de Cédric Villani de déménagement des gares de l'Est et du Nord en proche couronne ont choqué l'opinion à plus d'un titre. Avant eux, Gaspard Gantzer avait tenté l'expérience en proposant la suppression pure et simple du périphérique.

Lire aussi : Municipales: le mode d'emploi de Griveaux pour créer un Central Park à Paris

Toutes ces propositions, plus ou moins réalisables, soulignent en creux l'absence d'un véritable Grand Paris, tant au niveau institutionnel qu'organisationnel ou démocratique. Près de treize ans après le discours de Nicolas Sarkozy à Roissy, qui avait proposé la mise en place d'une communauté urbaine, les pouvoirs publics ont fait du surplace, malgré la création d'une conférence métropolitaine. Et ce n'est pas l'élection d'Emmanuel Macron, en 2017, qui a changé la donne.

Ce président, que d'aucuns qualifient de bonapartiste, et dont la conception du pouvoir reste très verticale, s'est bien gardé de rouvrir le dossier du Grand Paris, pourtant crucial pour cet espace économique qui concentre plus du tiers de la croissance française. Dans notre monarchie républicaine, le pouvoir central n'est pas encore prêt à partager son pouvoir au sein même de la région capitale.

Lire aussi : L'acte II manqué de Macron

Marc Endeweld

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.