Progression sensible du Front national, regain de la droite dite républicaine, et un parti socialiste, qui, à rebours de ce qu'annonçaient les sondages, ne s'effondre pas. Résumés à grand trait, les résultats des élections départementales peuvent-ils être riches d'enseignement pour la suite, c'est-à-dire pour 2017 ? Bien malin celui qui peut s'avancer sur les résultats de la future élection présidentielle, les candidats étant encore inconnus.
Et même si Nicolas Sarkzoy est désigné candidat de la droite à l'issue des primaires sera-t-il qualifié pour le second tour si François Bayrou lui ôte les voix du centre ? Et Marine le Pen est-elle vraiment assurée d'une présence au second tour de l'élection présidentielle? Aucune certitude à cet égard
Plus de triangulaires?
Si l'incertitude la plus grande règne sur la configuration de la prochaine élection présidentielle, le retour en France du tripartisme, avec une vie politico-électorale structurée autour de l'UMP, du PS et du FN, amène à s'interroger sur les prochaines échéances législatives. Va-t-on vers la multiplication, assez logique compte tenu ce de tripartisme renaissant, de triangulaires au second tour des législatives ? Et quelle serait alors la conséquence de cette lutte à trois, inédite sous la cinquième république ?
Pour de nombreux politologues, cette bataille d'une nouvelle forme n'aura tout simplement pas lieu.
« Le tripartisme ne va pas durer » estime Stéphane Rozès, président de CAP (Conseil, analyses, perspectives), et enseignant à Sciences Po et HEC. « C'est une dispute politique qui agrège les Français. Cette dispute est fondée sur un antagonisme entre la droite et la gauche. La présidentielle va redistribuer les cartes. De ce scrutin majeur, qui va remodeler le paysage politique, sortira à nouveau le bipartisme".
Pour Stéphane Rozès, « le président élu doit avoir les moyens de sa politique », et les Français en ont conscience : ils donneront donc au futur président une majorité. « Avec l'élection présidentielle, le pays impose sa marque. Les législatives ne sont que la suite » souligne-t-il.
La capacité pour le FN de se maintenir au second tour des législatives
De fait, la cinquième république se structure autour de l'élection présidentielle, qui aboutit in fine, par définition, la constitution le voulant ainsi, à un affrontement entre deux candidats. D'où la force du bipartisme.
Mais, quel que soit le vainqueur de la future présidentielle, et si ce n'est pas Marine le Pen, le Front National se couchera-t-il immédiatement, renonçant à une participation aux élections législatives qui suivront, au nom du nécessaire bipartisme ? Évidemment non.
Même sous l'hypothèse d'une forte abstention à l'occasion du premier tour de ce scrutin -de 30%-, il suffira de 17,9% des voix (suffrages exprimés) pour participer au second tour. La loi électorale impose en effet de rassembler 12,5% des électeurs inscrits pour pouvoir prétendre aller au-delà du premier dimanche des législatives.
Triangulaires et montée du FN
Dans la majeure partie des cas, et sauf si le PS s'effondre au cours des deux ans à venir par rapport à ses scores actuels, il aura des chances de se qualifier. Ce qui sera le cas, aussi, du FN et du candidat représentant la droite parlementaire. Les analystes électoraux même les plus dubitatifs sur l'avenir du tripartisme l'admettent, on comptera beaucoup de triangulaires au second tour des futures élections législatives, montée en puissance du FN oblige. « Il y aura effectivement plus de triangulaires » admet Stéphane Rozès, le FN réalisera une belle performance ». Toute la question est donc de savoir si cette configuration des triangulaires prédominera ou non.
Une réplique de l'élection partielle du Doubs?
Si c'est le cas, quel serait le parti en mesure d'engranger le plus de victoires ? L'élection partielle du Doubs, dans l'ex circonscription de Pierre Moscovici, qui a vu la victoire contre toute attente d'un candidat socialiste peut-elle servir d'exemple ? Dans ce scrutin, où l'on a vu une bataille entre le PS, l'UMP et le FN, on peut tirer un enseignement : quand le Front national atteint un score très élevé, même un PS décrédibilisé peut l'emporter in fine. Question d'espace électoral.
Pour le politologue Jean Chiche, chercheur au Cevipof, on aurait tort d'extrapoler à partir de ce scrutin. « Si les scores de ces départementales se reproduisaient aux législatives de 2017, il est possible que les triangulaires se multiplient ». Mais à qui profiteraient-elles, en premier lieu ? « Avec le quinquennat et l'inversion du calendrier électoral -la présidentielle avant les législatives- il y a une dynamique liée à l'élection présidentielle » répond Jean Chiche. En cas d'accession au pouvoir de Nicolas Sarkozy, une prime serait donc donnée aux candidats UMP lors des législatives. « On n'est plus dans la configuration de la gauche de 1997, remportant les législatives grâce aux triangulaires, mais à l'occasion d'un scrutin intermédiaire, deux ans après l'élection du président de la République ».
Le comportement de l'électeur FN sera déterminant. Dans l'hypothèse d'un échec de Marine le Pen à la présidentielle, ira-t-il à la pêche lors des législatives, déçu de l'accession à la tête de l'Etat d'un candidat « du système », ou cherchera-t-il au contraire à soutenir les candidats FN à la députation, y compris au second tour ?
En outre, en 2007 comme en 2012, les élections législatives ont donné lieu à une véritable campagne, comme pour un troisième tour de la présidentielle. Une campagne susceptible de faire bouger les lignes, tripartisme aidant ?
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