Pourquoi la démographie n'est pas déterminante pour les marchés

À quoi ressemblera le monde en 2050 ? Certaines tendances sont faciles à prévoir ; c'est le cas de la démographie. Sur la base des tendances des taux de natalité et de l'espérance de vie, la population mondiale devrait alors atteindre 9,7 milliards d'individus, selon les prévisions des Nations unies.[i]
(Crédits : DR)

D'après les sociologues qui s'expriment dans les publications que nous suivons, la majeure partie de la population vivra dans des zones urbanisées, ce qui devrait nécessiter une forte augmentation de la production d'électricité et d'autres infrastructures. De nombreux démographes auxquels nous prêtons attention estiment aussi que la majeure partie de cet accroissement de population s'observera dans l'hémisphère sud, par opposition à une population vieillissante, voire en diminution, au nord. Toutes ces prévisions sont peut-être très intéressantes d'un point de vue académique, mais de l'avis de Fisher Investments Europe, elles n'ont que peu d'utilité pour les investisseurs. Pour les marchés, nos recherches indiquent que la démographie n'est pas déterminante : elle ne conditionne pas les rendements des actions ni les pays, les secteurs ou les entreprises qui bénéficieront le plus de son évolution.

Les cours des actions, comme tous les prix, sont dictés par l'offre et la demande. De l'expérience de Fisher Investments Europe, c'est la demande qui mobilise le plus d'attention, car elle oriente généralement les mouvements des prix sur le court terme. Les actions se négocient sur un marché d'enchères et d'un point de vue technique, elles valent toujours le prix, quel qu'il soit, que les investisseurs sont prêts à payer sur le moment. La demande peut changer du jour au lendemain, mais l'offre évolue beaucoup plus lentement. Il faut des mois de préparation pour une introduction en Bourse, qui permet à une entreprise de s'inscrire sur un marché. Il en va de même pour les rachats d'actions, par lesquels une entreprise rachète ses propres titres en circulation et réduit ainsi l'offre en les retirant du marché. Les marchés baissiers (qui se caractérisent par des mouvements de repli prononcés, longs et généralisés de plus de -20 % et justifiés par des raisons fondamentales) peuvent démarrer lorsque l'offre s'emballe et dépasse la demande — la bulle technologique en fournit un exemple parfait —, mais le fait est que le plus souvent, selon nos recherches, le facteur déterminant à court terme est la demande.[ii]

Selon nous, une importance surdimensionnée est accordée à la demande comme moteur du marché. C'est probablement ce qui fait souvent dire aux commentateurs financiers que nous suivons que le vieillissement et la contraction de la population de l'hémisphère nord donneront lieu à un affaiblissement des rendements des actions, au motif que moins de personnes en âge de travailler équivaut à moins d'acheteurs d'actions. Fisher Investments Europe considère que cette logique ne résiste pas à un examen critique. D'abord, si l'on prévoit que la population de l'hémisphère sud connaîtra une rapide croissance sur la même période, il est raisonnable de penser qu'elle engendrera une hausse de la demande en actions qui compensera la baisse potentielle au nord. Ensuite, nous pensons que cette baisse supposée de la demande est en réalité loin d'être acquise. Avec l'allongement de l'espérance de vie, les retraités ont besoin de leur épargne pendant beaucoup plus d'années.[iii] Et pour cela, la détention d'actions est indispensable, estime Fisher Investments Europe. Enfin, en analysant les projections démographiques, nous avons découvert que celles-ci se fondent sur des prévisions de taux de natalité, mais qu'elles ignorent largement le potentiel d'accroissement de l'immigration, lequel nous paraît difficile à prévoir dans la mesure où la réglementation dépend des caprices politiques.

Surtout, nous pensons que prévoir la direction des marchés en fonction de l'impact de la démographie sur la demande ne tient pas compte de l'offre, laquelle nous paraît strictement impossible à prédire à long terme. Examinons plutôt : l'indice Wilshire 5000, qui recense toutes les entreprises américaines cotées en Bourse, ne contient actuellement pas 5.000 actions. Il tire simplement son nom du nombre de titres qui le composaient à sa création en 1974. Les gens savaient-ils alors qu'à la fin des années 1990, cet indice comporterait plus de 7.500 composantes ?[iv] Au plus fort de la bulle technologique, les gens savaient-ils que la frénésie des introductions en Bourse allait s'interrompre et que l'indice Wilshire 5000 ne contiendrait plus que 3.641 entreprises le 30 septembre 2021 ?[v] Tous les facteurs qui, selon nos recherches, influent sur l'offre d'actions (notamment les réglementations, le régime fiscal ou l'activité de rachat hors marché, entre autres) sont impossibles à prévoir, à notre avis, car ils dépendent de très nombreuses variables liées à l'humain. Nous ne pensons d'ailleurs pas que quelqu'un ait essayé de les prédire. Si c'est le cas, quiconque prétend être en mesure de prévoir l'offre à long terme est, à nos yeux, un imposteur.

Discerner les gagnants et les perdants à long terme des tendances démographiques parmi les entreprises, les activités et les secteurs nous paraît tout aussi vain. Prenons le cas de l'électricité. En extrapolant les tendances actuelles, on pourrait supposer que dans 30 ans, le moindre mètre carré d'espace libre sera recouvert de turbines éoliennes et de panneaux solaires (nous exagérons volontairement pour un effet spectaculaire). Et si le solaire et l'éolien n'étaient que des modes passagères ? Si les scientifiques faisaient une découverte révolutionnaire dans le domaine de la fusion nucléaire ? Si l'hydrogène venait à couvrir tous les besoins, à la fois de production d'électricité et de combustible automobile ? Ou si apparaissait une nouvelle technologie folle à laquelle personne n'a encore rêvé ? Le même raisonnement peut s'appliquer à l'infrastructure et à la production alimentaire, sans parler du moindre aspect de tous les biens et services qui existent à ce jour. Lorsque le monde de l'informatique était dominé par d'énormes ordinateurs centraux au milieu du 20e siècle, même les séries de science-fiction n'imaginaient pas les smartphones. Dans la version originale de Star Trek, le centre de commandement de l'Entreprise ressemblait à un vieux standard téléphonique, avec aucun écran tactile en vue. Si même les créateurs futuristes ne peuvent pas prédire l'évolution des technologies, comment le pourrions-nous, simples mortels ?

Pour conclure, la théorie économique considère que le capital humain n'est qu'une variable économique, au même titre que le capital financier, la technologie et la productivité, qui sont d'après nous impossibles à prévoir. C'est pourquoi, selon Fisher Investments Europe, les actions ne se projettent pas au-delà des 3 à 30 prochains mois. L'impact des changements démographiques aura probablement lieu plus tard, voire beaucoup plus tard, dans un horizon qui comporte, à notre avis, beaucoup trop de variables inconnues. L'innovation et le progrès technologique à long terme sont impossibles à prédire. Si c'était possible, nous serions tous équipés de réacteurs dorsaux et de voitures volantes, puisque c'est ainsi que beaucoup imaginaient notre époque entre le milieu et la fin du 20e siècle, à en juger par la pop culture. Nos recherches montrent que l'offre d'actions est impossible à prévoir au-delà d'un horizon de deux ans. Que les prévisions sur l'avenir lointain soient séduisantes ou effrayantes, ne les laissez pas influencer vos décisions actuelles en matière d'investissement. Concentrez-vous sur la situation des actions dans un avenir prévisible et sur l'offre et la demande dans cet intervalle.

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Ce document reflète les opinions générales de Fisher Investments Europe et ne doit pas être considéré comme une recommandation personnalisée en matière d'investissement ou de fiscalité ni comme un reflet de la performance client. Rien ne garantit que Fisher Investments Europe maintiendra ces opinions, qui sont susceptibles de changer à tout moment si de nouvelles informations ou analyses lui sont communiquées ou en cas de réévaluation de celles-ci. Les informations contenues dans le présent document ne constituent en aucun cas une recommandation ou une prévision quant à l'évolution des conditions de marché. Elles sont fournies à titre purement indicatif. La situation actuelle ou future des marchés peut différer considérablement de celle présentée ici. De plus, aucune garantie n'est donnée quant à l'exactitude des hypothèses formulées à des fins d'illustration dans le présent document. L'investissement sur les marchés financiers comporte un risque de perte de tout ou partie du capital investi, et rien ne garantit que ce montant pourra être récupéré. Les performances passées ne sont ni une garantie ni un indicateur fiable des performances futures. La valeur de vos investissements et les revenus qui en découlent peuvent fluctuer au gré des évolutions des marchés financiers et des taux de change mondiaux.

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[i] Source : Nations unies, au 30/11/2021.

[ii] Source : FactSet, au 07/01/2022. Affirmation basée sur la performance de l'indice MSCI World, dividendes nets réinvestis, en euros, 31/12/1969 - 31/12/2021.

[iii] Source : Banque mondiale, au 07/01/2022. Affirmation basée sur l'espérance de vie à la naissance dans l'ensemble du monde.

[iv] Source : Investopedia, au 30/11/2021.

[v] Source : Fiche descriptive de l'indice FT Wilshire 5000, 30/09/2021.

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